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Mise en abîme
Adios Shéhérazade de Donald Westlake
Délices & Daubes n° 164


Bien sûr que je vous ai déjà causé de cet écrivain extraordinaire qu’est Donald Westlake, disparu à 75 balais l’année dernière.

Non seulement il écrit des histoires vraiment tordantes quand il met en scène son cambrioleur malchanceux John Dortmunder (confer D&D 6, 17, 33, 54, 99), non seulement il écrit aussi des vrais polars noirs durs, non seulement il a écrit une bonne centaine de romans, et même de la SF, mais en plus il a écrit « Adios Shéhérazade ».

Alors oui c’est la mode aujourd’hui en “blanche” ou “mainstream” que d’examiner avec attention les circonvolutions délicates de son propre nombril et d’appeler ça une extraordinaire et vertigineuse mise en abîme. Oui c’est furieusement tendance que d’auto analyser son angoisse face à la page blanche et de se perdre dans des réflexions existentielles sur le comment du pourquoi ne pas avoir envie d’aller prendre un verre au Flore aujourd’hui.

Oubliez ces faiseurs, oubliez ces philosophes de comptoir même pas en zinc, et, pour la problématique de la panne d’inspiration, lisez « Adios Shéhérazade ».

Edwin Topliss est un nègre, il écrit des romans pornos pour un autre, à la chaîne, un par mois en dix jours. Et puis ça commence à coincer. Il n’y arrive plus. Il en a assez de ce métier. Et au lieu d’écrire son porno il commence à délirer, à raconter sa vie. Ses vies plutôt : la vraie et la fantasmée. Il raconte ses souvenirs et parfois il les embellit, ou il les invente. Et il se pose des questions.

C’est incroyable de sensibilité et d’intelligence. C’est prodigieusement construit et déconstruit. C’est un OLNI. C’est drôle et c’est triste. C’est rigolo et c’est angoissant. C’est grossier et d’une incroyable finesse. C’est aussi un peu un porno. Et c’est une histoire d’amour, une sorte de. “Une hilarante tragédie”, en disait Jean-Patrick Manchette.

Voilà un écrivain, un vrai, avec un cerveau et un sexe, et énormément de talent.

Dommage qu’on n’attribue le Nobel ni aux auteurs de littérature de genre ni à titre posthume.

Vive Westlake.


Henri Bademoude
13 août 2009


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