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Prédateurs
Maxime Chattam
Pocket, thriller, roman (France), tueur en série, 569 pages, mai 2009, 8,10€

Lors d’une guerre sans nom, des G.I. prêts à passer à l’assaut sont secoués par un meurtre atroce.
Le lieutenant Frewin de la Police Militaire et l’infirmière Ann Dawson, bombardée experte dans les côtés sombres de l’âme humaine, vont devoir débusquer un tueur en série particulièrement retors tout en luttant contre leur propre part d’ombre.

Mais comment débusquer un monstre au milieu d’hommes entraînés à tuer ?



Un roman nettement meilleur que « L’Âme du Mal », qui se présentait comme un vulgaire copier-coller de théories du complot ponctué de scènes d’action à peine dignes d’un film de Michael Bay, et second d’une nouvelle trilogie bien arbitrairement nommée en toute modestie Le Cycle de la Vérité, comme si l’auteur se prenait soudain pour Paulo Coelho

Pourtant, on n’est pas vraiment dans le conte philosophique. Et c’est là qu’on peut difficilement aborder ce roman sans monter en épingle son principal défaut : le style. Celui de Chattam étant en régression constante par rapport à ses débuts. Très factuel, sans descriptions ni notes d’atmosphère, avec des anglicismes qui, on l’espère, sont dûs à la négligence plus qu’à l’effet de mode, il gâche certains passages prenants en laissant le lecteur remplir les blancs.
Il n’est évidemment pas question de ressusciter la controverse haïssable entre roman populaire et littérature dite « grande », forcément taxée de « prise de tête », débat stérile mollement attisé par quelques besogneux confondant populaire et populiste (et particulièrement creux maintenant que « La Princesse de Clèves » fait figure de roman subversif…), mais d’autres ont une exigence de style plus élevée (Frank Thilliez ou Camut/Hug, par exemple, ou même Patrick Bauwen).
Et tout de même, lorsqu’on appelle sa trilogie Le Cycle de la Vérité (trouvaille de crâne d’œuf du marketing ?), le cochon de payant est en droit de demander un brin de valeur ajoutée… De même, on pourra ricaner en voyant que l’éditeur réduit la bibliographie de l’auteur à une « trilogie »… en cinq volumes ! Ce doit être ’achement concept. Coco.
Et puis, quand en finira-t-on avec la doxa du « Français abordant le genre américain du thriller » ? Purification ethnique très mode, cache-sexe de l’ignorance crasse qui passe à la trappe du critiquement correct tout un pan du roman populaire francophone, de Gaboriau ou Leblanc jusqu’à Boileau-Narcejac (chroniqueurs officiels syndiqués qui me liront peut-être, puis-je vous rappeler humblement que ces derniers furent adaptés à l’écran, sans doute par distraction, par un certain Alfred Hitchcock, sans oublier le classique « Les Diaboliques » ?), le belge S.A. Steeman ou Fred Kassak ? Certes, un bon cliché se doit d’être amorti, mais tout de même…

Ce roman, donc, se présente comme un mélange de psycho très « Saw » et de whodunit à la Agatha Christie avec même sa liste de suspects évoluant au fil de l’intrigue. Pas de doute, comme roman de plage, celui-ci se lit vite… trop vite peut-être, car ce côté squelettique sans véritable recherche d’atmosphère ou d’évocation visuelle fait que, pris par son rythme effréné, on n’a pas envie de s’attarder sur une seule page.
Et puis ce même aspect whodunit souffre d’un défaut rédhibitoire au genre : si le fait de prendre comme protagonistes des soldats, donc des tueurs en puissance, est bienvenu, lorsqu’on se retrouve face à une meute de suspects ayant tous les mobiles et les capacités de commettre le ou les crimes, que ce soit l’un ou l’autre en devient malheureusement accessoire.

L’ensemble se termine sur la métaphore habituelle que Chattam explore depuis son premier roman (et avec la connaissance du sujet nécessaire) : l’homme est un loup pour l’homme, le Mal avec un grand M réside en chacun d’entre nous, certains sont juste poussés vers le Côté Obscur de la Force (tm) pour s’y abîmer totalement.
Une vérité certes bien consensuelle, puisque le Mal, c’est toujours l’Autre, mais bonne à rappeler en ces temps où l’absence d’empathie pour ce même Autre (définition clinique de la psychopathologie) semble encouragée au nom du consumérisme effréné…

À boire et à manger donc dans ce gros frileur qui fait figure de roman de plage décent… mais pas plus. Reste pour le lecteur exigeant l’impression un brin frustrante que Maxime Chattam est capable de faire mieux.
Tellement, tellement mieux…


Titre : Prédateurs (roman, France)
Auteur : Maxime Chattam
Couverture : BSIP/Barbera Strnadova
Première édition : Albin Michel (2007) (Voir la critique parue à sa sortie grand format)
Éditeur : Pocket
Collection : Thriller
Site internet : auteur, fiche roman (site éditeur)
Pages : 570
Format (en cm) : 10,8 x 17,7
Dépôt légal : mai 2009
ISBN : 978-2-266-18878-4
Prix : 8,10 €



Maxime Chattam sur la Yozone
- La Théorie Gaïa (Albin Michel, 2008)
- Prédateurs (Albin Michel, édition originale, 2007)
- Les Arcanes du Chaos (Albin Michel, 2006)


Thomas Bauduret
27 juillet 2009


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