Dans un premier roman, il est tentant de mettre tout ce qui peut intéresser l’auteur, quitte à trop charger la barque… Et c’est ce qui arrive dans ce torrent exploitant la mode du complot apocalyptique, la SF pure et dure ainsi que le polar, voire l’énigme.

À travers la voix de son narrateur quasi-homonyme de l’auteur, on attaque dans le vif du sujet, puisque c’est dès les premières minutes ou presque que le personnage est mis au courant des enjeux de base. Naît une étrange sensation de flou artistique sur une narration qui ne s’embarrasse guère de crédibilité (l’enquête semble se limiter à l’intérieur de l’INGEN, nul ne semble vraiment choqué par ces assassinats et la police est quasi-inexistante. Sans oublier la logique de faire enquêter un scientifique dépourvu de formation en criminologie…) où l’on discute aussi bien Darwin ou Teilhard de Chardin que de génome humain en passant par les aventures de Tintin ! (Par un twist qui, en fait, désavoue une bonne centaine de pages de l’histoire !)

Et ce n’est pas tout : vous voulez une caste stigmatisée à l’ADN impur pour laquelle il est interdit de procréer, comme dans la SF des années 70, avec toutes les obligatoires révélations qu’implique le thème ? Y’a. Une femme fatale ? Y’a. Des théories du complot à la pelle ? Y’a. Une visite d’un New York dévasté digne d’un « L’Armée des 12 Singes » ? Soyez comblé (ce passage est d’ailleurs peut-être le meilleur du roman.) Des monstres ? Itou. Et ce n’est pas tout : vous voulez aussi l’exploration de souterrains mystérieux avec passage secret et une secte luciférienne, soutanes comprises ? Vous allez rire : y’a aussi.

Au bout d’un moment, c’est vrai qu’on est tenté de dire « n’en jetez plus ! », d’autant que, pour réhausser le suspense, il y a toujours un Personnage Mystérieux (TM) pour venir énoncer quelques perles de sagesse ! Dans ce contexte, la fin en demi-teinte en est presque surprenante. Preuve que les meilleures apocalypses sont toujours feutrées…

Difficile donc de s’y retrouver dans ce fatras vertigineux… sauf que Gilles Haumont semble égrener tout ça avec le plus grand sérieux et un enthousiasme relativement communicatif, plus un assez joli brin de plume.
Du coup, passé le choc initial, il est difficile de s’ennuyer dans ce roman où l’on s’ingénie à mettre un élément nouveau par page. L’ensemble met une telle énergie à convaincre que l’entreprise en devient sympathique et qu’on se prend au jeu du « qu’est-ce qu’il va encore inventer ? »

Difficile donc de se faire une opinion sur ce roman fourre-tout, trop touffu pour être vraiment convaincant, mais qui devient vite un plaisir coupable.
Tient-on là une sorte de nouveau Ponson du Terrail ? Le second roman de l’auteur démontrera s’il a effectivement dit tout ce qu’il avait à dire. En tout cas, une curiosité, à sa façon.

Titre : L’Origine du Mal (France, 2008)
Auteur : Gilles Haumont
Couverture : Leptosome
Editeur : LGF
Collection : Livre de Poche - Thriller
Édition originale : Anne Carrière Éditions (avril 2008, ISBN 2843374774)
Site internet : Site éditeur, site auteur, une interview de l’auteur
Pages : 506
Format (en cm) : 11 x 17,8
Dépôt légal : février 2009
ISBN : 978-2-253-12532-7
Prix : 6,75 €