Le Poète et Milton essaient de changer la face du monde en misant sur la jeunesse. Des enfants d’Exclus sont élevés à l’abri. Sans puce électronique implantée dès la naissance, ils conservent leur libre-arbitre et constituent l’espoir d’un changement, car ils ne sont pas soumis aux difficiles conditions de vie des Exclus, obligés de se terrer pour ne pas être la cible des Pols. Ces policiers du futur ont le droit de tirer sur toute personne déviante, c’est-à-dire n’obéissant pas au doigt et à l’œil au pouvoir en place.
Toute fantaisie est bannie (pas de livres ou de musique), car l’esprit ne doit pas s’évader. Le rêve est ainsi éradiqué. Les parents connaissent déjà le rôle futur de leurs bébés dans cette société qui ne laisse pas le choix. Les masses sont contrôlées par l’électronique et les produits apaisants.

Au fil des descriptions de ce monde où l’individu doit rentrer dans un moule et ne pas faire de vague, « 1984 » de George Orwell, « Le Meilleur des Mondes » d’Aldous Huxley ou encore « Fahrenheit 451 » de Ray Bradbury nous viennent à l’esprit. D’ailleurs, en fin de volume, l’auteur lève le masque sur les origines de la société décrite et les références n’en deviennent que plus évidentes.

L’univers du livre est au centre du récit, on ne peut y échapper. Par exemple : les professeurs du château de Balmoral, dans lequel grandissent les enfants protégés, portent des noms tels que Stevenson, Cicéron, Mme Bovary. De plus, les références sont légion.

Le sauvetage des Exclus entraîne le groupe des trois dans une quête initiatique. Livia, Marcus et Tavius quittent leur cocon pour une mission périlleuse. Du stade de l’adolescence avec ses futilités et ses disputes, ils passent au rang d’adultes avec des responsabilités. Leurs préoccupations changent et ils n’agissent plus uniquement pour leur propre compte, mais pour celui du plus grand nombre. Face aux épreuves, chacun révèle sa vraie nature.

La cité sans rêves est plus évoquée que réellement décrite, et l’histoire est assez simpliste. Les trois adolescents partent du château, découvrent un nouveau monde, bravent le danger qui les rend plus grands et remplissent à bien leur mission. Le chemin est tracé dès le départ et le lecteur n’est pas vraiment surpris. À la fin, l’auteur nous réserve bien une révélation censée être renversante mais, au vu du ton employé en début de roman, y adhérer s’avère difficile.
Alors que « Un Monde sans Rêves » se lit facilement, que tous les clins d’œil à d’illustres ouvrages sont sympathiques (si on les a lus !), le petit effet que Nicola Morgan a voulu mettre pour le conclure tombe à plat et laisse un sentiment mitigé.

Entre les jeunes lecteurs qui connaitront déjà les classiques évoqués et ne trouveront sûrement pas grand intérêt à « Un Monde sans Rêves » et ceux qui ne saisiront pas les allusions, donc passeront à côté du meilleur, Nicola Morgan peine à convaincre.

Titre : Un Monde sans Rêves (Sleepwalking, 2004)
Auteur : Nicola Morgan
Traduction de l’anglais (GB) : Raphaële Eschenbrenner
Couverture : François Roca
Éditeur : Albin Michel
Collection : Wiz
Pages : 236
Format (en cm) : 21,5 x 14,5
Dépôt légal : avril 2008
ISBN : 978-2-226-18330-9
Prix : 12 €