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Andrew J. Robinson (Star Trek Deep Space Nine)
Constellation 3 : Phénix, la convention française des séries SF et Fantastiques
29/30 mai 2004 Hôtel Hyatt à Roissy

Andrew J. Robinson est un acteur dans la grande tradition américaine de la profession. Parlant un peu le français, il vit à Paris une partie de l’année car sa femme y possède un appartement, sa culture littéraire et théâtrale est exemplaire. Révélé et marqué par le rôle du tueur psychopathe dans “Dirty Harry” en 1971 (son premier rôle), il n’a eu aucune peine à interpréter le personnage parfois schizophrénique du tailleur-espion Cardassian dans ce qui est sans doute la série la plus ambitieuse de tout l’univers Star Trek : Deep Space Nine.
On n’est donc nullement surpris de se retrouver en train de disserter de Commedia Del Arte ou de théâtre, de Guerre du Viétnam et de politique avec lui. Rencontre avec un homme vraiment remarquable !



Vous avez un rôle assez important dans la série “Star Trek Deep Space Nine” et nous aimerions savoir si ces sept années n’ont pas été trop dures à supporter, professionnellement parlant ?

Non, en fait. ma grande chance est que ce rôle important m’offrait dans un même temps un poste d’acteur intermittent dans la série. Ce furent donc sept années en pointillées durant lesquelles j’ai pu aussi apprendre beaucoup grâce à Star Trek sur le métier de réalisateur. J’ai donc très bien supporté cette période car j’ai pu ensuite me lancer dans une carrière de metteur en scène de théâtre, ma vraie passion.

Au fait, comment êtes-vous arrivé sur le tournage de Deep Space Nine ?

C’est grâce à mon agent mais au début, je devais tenir le rôle du métamorphe Odo. J’étais d’ailleurs vraiment très près d’avoir ce rôle. Et puis, j’ai du encore passer plein d’auditions, ce qui est finalement très habituel aux USA où vous seriez surpris de savoir combien d’acteurs, même importants, doivent passer des auditions, pour finalement me retrouver avec le rôle de Elim Garak.

Aviez-vous déjà fait des apparitions dans Star Trek ou joué dans des films de SF avant DS9” ?

Non, pas de SF mais j’avais déjà tourné dans plusieurs films d’horreurs comme Hellraiser en 1987. J’y étais souvent ultra maquillé ou masqué d’ailleurs. C’était très dur à supporter à l’époque. Aujourd’hui, la technologie du maquillage a tellement évolué que c’est presque devenu un plaisir. Même le personnage de Garak où je supporte un maquillage très lourd a finalement été une excellente opportunité pour moi. J’ai pu, à cause des contraintes physiques du “déguisement”, me concentrer et développer une manière très précise d’interpréter ce personnage. Cela m’a rappelé, d’une certaine manière, mes débuts au théâtre où j’étais passionné par la Commedia Del Arte. L’utilisation des masques ou de maquillages y est omniprésente. D’une certaine manière, Star Trek et La Commedia Del Arte, c’est pareil ! En tant qu’acteur, j’y ai compris une chose fondamentale : tout passe par les yeux et c’est le reste du corps qui devient le véhicule du jeu. Et quand on a compris tout cela, derrière le masque et le poids apparemment contraignant du maquillage, on trouve une liberté d’expression formidable ! C’est très important d’y penser intelligemment. Derrière votre déguisement, les spectateurs vont regarder vos yeux et rien que vos yeux !

Aviez-vous une influence sur l’évolution du personnage Garak ?

Je n’avais aucune influence sur l’écriture des scénarios ou sur les histoires. De toute façon, ça n’aurait eu aucun intérêt car ce sont réellement des gens très talentueux qui s’occupent de ça. Par contre, j’avais une grande liberté d’expression quant à l’interprétation de Garak. Les réalisateurs ont aussi été très attentifs à cela et chaque fois qu’ils sentaient que je faisais un truc original et que cela leur plaisait, ils me le disaient et on travaillait dans cette direction.

Vous parliez tout à l’heure de Commedia Del Arte mais à la Yozone, nous pensons que DS9 est une des séries les plus réussies de la Sci- Fi parce qu’elle reprend bien souvent les grandes règles du théâtre classique : simultanéité du lieu, de l’action, du temps, mêmes personnages, etc,. Qu’en pensez-vous ?

Tout à fait d’accord avec vous. DS9 est un microcosme en soit sur lequel on construit des tensions, des combats, des drames, des comédies, etc,. Le pouvoir d’identification de ce type de série est très fort pour le téléspectateur. Même si l’on y retrouve certains des clichés dangereux des séries américaines (et européennes ! ndlr) du samedi soir, les bons d’un coté et les mauvais de l’autre, elle va souvent beaucoup plus loin. C’est très important et c’était un pari très risqué à l’époque car l’approche américaine est souvent simpliste. Donc Deep Space Nine, c’est de la Sci-Fi mais qui se rattache effectivement à une grande tradition classique et théâtrale.

Votre première réalisation était un épisode de Deep Space Nine. Avez-vous aimé cet autre coté du miroir, vous qui étiez un acteur de la série ?

Non, car finalement je n’aime pas ce boulot dans le cadre d’une série télévisée. Moi, ma vraie passion de metteur en scène, c’est le théâtre. A la télé, la décision finale appartient aux scénaristes qui écrivent l’histoire et aux producteurs qui financent. Le réalisateur n’y a qu’un rôle secondaire. Par contre, j’y ai beaucoup appris, techniquement parlant. Mais ce que je sais bien faire et ce que j’aime, c’est la mise en scène théâtrale.

Quel est le rôle qui vous a le plus marqué dans votre carrière ?

Aucun doute possible, c’est le rôle du tueur dans Dirty Harry (1971, ndlr). Pour être totalement franc, je pensais même débuter une grande carrière à l’époque puisque c’était en plus mon tout premier rôle. Mais à cause des circonstances et de ce qu’était l’Amérique en pleine Guerre du Viétnam, j’ai été listé et cantonné par les directeurs de casting aux rôles de psychopathes... Au finish, Dirty Harry fut une grande expérience... très décevante, assez traumatisante et j’ai été obligé de repasser par la case théâtre afin de m’en remettre. Comprenez-moi bien. Je ne voulais absolument pas devenir, ce qui aurait été facile à l’époque vu les propositions que je recevais, un Boris Karloff ou un Bela Lugosi bis !.

Vous parlez souvent de l’évolution politique, sociale, présente ou passée des USA et cela semble être un sujet préoccupant pour vous. Que pensez-vous de la société américaine actuelle (en mai 2004, ndlr) !

Les sentiments anti français, anti allemands, voire anti européens, la vieille Europe et toutes ces bêtises, c’est vraiment de la connerie totalement manufacturée et montée en épingle par l’équipe de Bush pour faire accepter la guerre au peuple américain. C’est profondément désespérant et ça l’est encore plus quand on connaît l’influence désastreuse que cela donne de l’image des USA dans le monde. Cela me fait penser à la période de la Guerre du Viétnam. Les Américains ne comprennent toujours pas que les gens qui reviennent de ce type d’aventures sont totalement changés et détruits. Je suis consterné et choqué par cette situation.

A ce propos, quelle a été votre réaction quand vous avez appris qu’un film anti Bush recevait la Palme d’Or à Cannes d’un Président américain du Jury (Quentin Tarantino, récompensant Michael Moore, ndlr) ?

J’ai été complètement ébahi qu’un festival pareil où l’industrie du cinéma est autant présente prenne cette décision. C’était Cannes, quand même et c’est devenu une affaire politique ! Je suis toujours aussi surpris quand j’y repense mais quelle bonne surprise pour les gens comme moi !

Avez-vous des projets à l’heure actuelle et quels sont-ils ” ?

Oui, plein ! Du théâtre et du théâtre ! J’ai un projet sur le feu dès que je reviens à Los Angeles début juillet car je suis le Directeur Artistique d’une petite compagnie théâtrale et plusieurs autres projets sur diverses scènes américaines ou je vais être amené à travailler.

Pressés par le temps et les yeux courroucés des organisateurs de Phénix 2004 devant les minutes qui défilaient, nous avons quitté Andrew J. Robinson sur ces dernières confidences, persuadés d’avoir croisé la route d’un être profondément respectable. Nos vœux de réussite l’accompagnent.

Propos recueillis par Bruno Paul et Stéphane Pons
Rapport de mission par Stéphane Pons pour le vaisseau d’exploration Yozone


Bruno Paul
Stéphane Pons
14 novembre 2004



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Garak



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Andrew J. Robinson



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Andrew Robinson en séance de dédicace



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Andrew Robinson / Stéphane Pons



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Andrew Robinson sur scène



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Bruno Paul / Andrew J. Robinson



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