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Monte Cristo
Diaphana Édition Vidéo - TF1 Vidéo Distribution
16 octobre 2008 - Édition Double DVD

Il s’appelle Edmond Dantès, marin, il est le second du navire Le Pharaon. Accusé à tort de bonapartisme, il est incarcéré dans une geôle du château d’If où il est censé moisir jusqu’à la fin de sa vie.
Cependant, sa rencontre avec l’abbé Faria va lui permettre de s’évader et de récupérer un fabuleux trésor.
Edmond Dantès va alors devenir l’abbé Busoni et le Comte de Monte Cristo. Il va mettre son immense fortune au service d’une cause vengeresse : démasquer ceux qui l’ont injustement accusé et condamné.

Cette édition double DVD présente une version intégrale, totalement restaurée du chef d’œuvre de Henri Fescourt, accompagnée d’une très belle et adéquate partition musicale du compositeur Marc-Olivier Dupin spécialement écrite à cette occasion.
Le film date de 1928-29, muet, en noir et blanc et s’avère être l’essence même du grand cinéma.



LE SUJET


Nous ne reviendrons point ici sur l’histoire du prisonnier le plus célèbre de l’histoire de la littérature, sinon pour convenir d’une chose, le réalisateur Français Henri Fescourt en livre une adaptation d’une grande fidélité, ne trahissant jamais l’esprit du roman.
Contrairement à la dernière version télévisuelle de Josée Dayan, saccageant comme souvent l’histoire et son sujet sous de fallacieux prétextes d’actualisation pour un résultat pathétique, Henri Fescourt met tout son talent dans la narration, offrant quantités de scènes d’anthologie, ensorcelantes ou au réalisme troublant, tout en ne dévaluant jamais les aspects moraux de cette intrigue vieille comme le monde.

Après tout, l’histoire du Comte de Monte Cristo ne fait que poser, brillamment, une interrogation universelle qui tient en peu de mots. Un être humain a-t-il le droit moral de se substituer à la justice (ou à Dieu) pour appliquer la loi du Talion et rendre coup pour coup à ceux qui l’ont fait souffrir ?

CE QUE L’ON EN A PENSÉ


Réalisateur connu des cinéphiles et un peu oublié du grand public, Henri Fescourt avait déjà réalisé dès 1925 une remarquable adaptation des « Misérables » (la plus belle à ce jour ?) qui figure pour toujours au Panthéon du 7e art. Avec son « Monte Cristo » (1928-29), il réédite son exploit, preuve concrète s’il en était besoin, que son précédent chef d’œuvre n’était pas le fait du hasard, mais bien la preuve d’un grand talent.
Dans cette version d’une longueur inhabituelle de nos jours, mais courante à l’époque du muet (3h38), ce qui étonne par-dessus tout tient dans plusieurs facteurs et se résume en un seul mot : la modernité.

Décors nombreux et ambitieux, c’est tout autant la vie dans le village des « catalans » qui est reconstituée minutieusement, qu’une soirée à l’Opéra avec grande foule et spectacle inclus. La sauce ne peut que prendre à ce niveau de magnificence.
Idem pour les effets spéciaux, apparents ou discrets en fonction de leur utilité, dans quelques scènes toujours traitées sur le mode onirique avec une réelle ambitions fantastique.Quelles fassent référence à une notion de rêve éveillé, à l’évocation de visions dues à la prise d’un narcoleptique, qu’elles soient des flash-backs dont la portée psychologique est toujours évidente et basée sur la compréhension du scénario, le ton est donné, l’imaginaire est en permanence présent et le spectateur sollicité.
Entre l’expressionnisme de certaines séquences dont les contrastes sont parfaitement restitués sur cette édition DVD et les morceaux de bravoure qui épatent encore -et soutiennent la comparaison avec les maîtres étalons US contemporains- on est baba devant tant d’aisance cinématographique.
La réalisation est évidemment de haute tenue. La caméra est parfois en plan fixe (une contrainte liée aux technologies de l’époque), mais se meut aussi avec une rare élégance (une prouesse technique dans les années trente). Elle accompagne aussi les nombreux acteurs présents sur une scène ou balaye d’un regard aigu et perçant la plénitude d’un plateau.
Chaque expression des nombreux visages aperçus s’imprime alors de manière inconsciente et vient renforcer le pouvoir de persuasion qui émane du film. Les références sont nombreuses et l’on ne peut que souligner l’extrême sensibilité artistique avec laquelle Henri Fescourt saisit et fixe pour l’éternité ses acteurs.
Le tryptique Edmond Dantès-Abbé Busoni-Comte de Monte Cristo est un personnage complexe, souvent d’une extrême et injuste cruauté. Ce détail n’est jamais oublié ici, et contrairement à de nombreuses autres adaptations plus récentes où la nécessité de le rendre sympathique aux yeux des spectateurs entraînait une absence de jugement moral de ses actes, sa détermination inquiétante et hors norme à rendre « sa » justice n’est jamais oubliée dans le scénario. Autant “Dantès” suscite la pitié et l’empathie, autant “Monte Cristo” devient un prince noir de la vengeance, certes compréhensible, mais finalement inexcusable, autant l’Abbé Busoni intervient comme un contrepoids humaniste et généreux.

La distribution des rôles est aussi ambitieuse. Jean Angelo (Dantès-Abbé Busoni-Monte Cristo), dont la carrière avait vraiment démarré dans « L’Atlantide » (1921) de Jacques Feyder (première d’une des nombreuses adaptations du roman de Pierre Benoît) et que l’on retrouvera dans le même rôle dans la version française de Pabst en 1932, est un remarquable interprète des différentes facettes du personnage central. Il prouve par l’exemple que la mutation d’un acteur en de multiples personnages au sein d’un même film n’est pas seulement l’apanage des grands acteurs contemporains et une invention récente, mais bien l’essence d’un métier depuis ses origines jusqu’à nos jours.
Quant à Gaston Modot (Fernand de Mondego-Fernand de Morcef), la rigidité de ses expressions impose une forme de dureté qui convient au rôle du traître sans remords qui survit sans mal à ses méfaits. Si son visage vous rappelle quelqu’un, ne soyez pas étonnés, on le retrouve également dans de nombreux classiques du muet, mais aussi du parlant (« L’âge d’Or » de Buñuel ou « La Règle du Jeu » de Renoir par exemple). Lil Dagover (Mercédès-la Comtesse de Morcerf), actrice d’origine allemande née en Indonésie, incarne une héroïne au jeu forcément plus classique -qui correspondait aux stéréotypes du muet. Cela ne l’empêche pas d’être totalement convaincante et de distiller une douce et triste mélancolie qui établit la marque de fabrique de toutes les futures Mercédès.

À noter, ce « Monte Cristo » est projeté accompagné d’une partition musicale contemporaine, spécialement écrite à l’occasion de sa restauration par Marc-Olivier Dupin. Si le compositeur ne renonce pas (et c’est heureux) au principe de l’illustration sonore par des choix rythmiques ou mélodiques directement liés à ce que l’on voit à l’écran, il propose également de nombreux thèmes originaux d’une grande qualité qui allient clin d’oeils symphoniques et choix personnels. Contrairement au travail d’un Joe Hisaichi qui pour « Le Mécano de la Générale » faisait un excellent boulot, mais du Joe Hisaichi pur sucre et phagocytait l’œuvre originale, Marc-Olivier Dupin nous semble garder la bonne distance entre sa personnalité d’auteur, les thèmes en vogue à l’époque de la production du film et le respect qu’il devait à la grande sensibilité qui émane de ce « Monte Cristo ».

L’ÉDITION DVD


Reprenant la version entièrement restaurée dont la chaîne Arte avait déjà assuré une diffusion télévisuelle cet été, tiré à partir des négatifs originaux, le film scintille de mille feux. Le traitement de l’image est quasi parfait. Nettoyé des défauts accumulés au cours des décennies, le film semble sortir des laboratoires de développement et avoir emprunté une machine à voyager dans le temps.
Côté son, il faut noter le rendu parfait (en Dolby Stéréo) de la très belle partition musicale écrite par Marc-Olivier Dupin (compositeur et chef d’orchestre, directeur de l’Orchestre Nationale d’Île-de-France et à la tête de France musique). On peut cependant regretter l’absence d’autres options tant on aurait aimé voir les différences spatiales que ces choix sonores auraient forcément déclenchées.
Idem pour les sous-titres (aucun en langues étrangères) et le néant total des bonus, certes en balance avec le copieux livret intégré au coffret. Un tel travail de restauration aurait sans doute mérité un « making of », un petit doc sur Henri Fescourt eut été la bienvenue.
Ce coffret double DVD, de grande qualité, est donc un peu spartiate par principe (le film et rien que le film).

CONCLUSION


Cette édition du « Monte Cristo » de Henri Fescourt met à la disposition du grand public un des rares films que tout cinéphile se doit d’avoir à sa disposition permanente pour de fréquents visionnages.
Est-il utile d’en dire plus ?

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Edmond Dantès - Le Comte de Monte Cristo (« Monte Cristo », 1928-29).

Monte Cristo
- Édition Double DVD avec livret collector (64 pages)
- Références : EDV 1509 - DIV 526
- Éditeur : Diaphana Édition Vidéo
- Distribution : TF1 Vidéo
- Presse : Dark Star Presse (Nathalie Urbain)
- Restauration inédite de la version originale : Neg. A – 1999/2006 par ZZ Productions – 112049
- Avec la participation de : Arte France & de l’Ondif
- Avec le concours du : GosFilmoFond (Russie) et des Archives Françaises du Film-Centre National de la Cinématographie.
- Laboratoire : DIGImage
- Musique de Marc-Olivier Dupin (2005)
- Interprétée par : l’ONDIF (sous sa direction)
- Parution : 16 octobre 2008
- Prix Public conseillé : 24,99€

Film Français d’Henri Fescourt (1928-29)
Durée : 3h38 (en deux parties)
Assisté de : Armand Salacrou, Henri Debain, Isabelle Brabo, Jean Godard
Scénario et adaptation : Henri Fescourt
D’après le roman de : Alexandre Dumas et Auguste Maquet
Avec Jean Angelo (Edmond Dantès /Abbé Busoni /Comte de Monte-Cristo), Lil Dagover (Mercédès /Comtesse de Morcerf), Gaston Modot (Fernand de Mondego/Comte de Mortcerf), Marie Glory (Valentine de Villefort), Pierre Batchef (Vicomte Albert de Mortcerf), Jean Toulout (Monsieur de Villefort), etc.
Images (panchromatiques) : Julien Ringel, Henri Barreyre, Goesta Kottula (et Maurice Hennebain)
Assistés de : Paul Fabian
Photographies de plateau : Maurice Hennebain, Sacha Masour (et G. L. Manuel Frères)
Costumes : Boris Bilinsky (maquettes), exécutés par la Maison Granier
Décors : Boris Bilinsky (maquettes), exécutés par Louis Bertin Moreau
Effets spéciaux & décors : Paul Minine & Nicolas Wilcke
Régie : Léon Courtois, Fernand Tanière, Henri Pauly (et André Daven)
Armateur (du Pharaon) : Marius Valoussière
Montage : Jean Louis Bouquet
Direction technique & Administration générale : Franck Daniau Johnston
Administrateur : Mouquet
Producteur : Louis Nalpas
Production : Films Louis Nalpas
Ventes internationales : Grands Films Européens

DVD


Deux DVD 9, Pal, Zone 2, Noir et Blanc (partiellement teinté)
Image : format film 1.33 (4/3)
Intertitres : Français
Son : Dolby Stéréo (musique)

DVD 1 :
Première époque : Edmond Dantès et le Comte de Monte-Cristo
Durée : 2h5’34’’
Chapitres : 16 accessibles par le menu « Chapitres » (35 disponibles)
Bonus : Espace Diaphana (4 bandes annonces), crédits

DVD 2 :
Seconde époque : Le Châtiment
Chapitres : 12 accessibles par le menu « Chapitres » (29 disponibles)
Durée : 1h37’30’’
Bonus : néant


Stéphane Pons
22 octobre 2008



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Henri Fescourt, réalisateur et scénariste de ce « Monte Cristo » (1928-29).



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