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Révoltés de la Bounty (Les)
Jules Verne
Gallimard, Folio 2€, nouvelles (France), aventure et fantastique, 111 pages, décembre 2007, 2€

En 1787, l’équipage d’un navire d’exploration anglais se révolte et met sur une chaloupe le capitaine du vaisseau et ses officiers les plus fidèles.
Pourquoi ? Que sont-ils devenus ? Ont-ils survécu ?
Jules Verne, en se basant sur les archives de la Royal Navy, trace en quelques dizaines de pages son histoire des « Révoltés de La Bounty ».

Un vieil horloger orgueilleux ne pense qu’à ses montres, à ses horloges et au temps qu’il veut par-dessus tout dompter. Mais le jour où ses machineries de précision et d’exception s’arrêtent les unes après les autres, c’est rien moins que la mort qui frappe à la porte de « Maître Zacharius ».
Ou le Diable, tout simplement !




De l’aventure, du fantastique et toujours la grande rigueur narrative de l’écrivain français.
Amateurs de textes méconnus ou peu édités, de curiosités littéraires du grand Jules Verne, ce Folio 2€ est pour vous !

Si le grand public connaît l’écrivain nantais le plus célèbre du monde, c’est qu’il a au moins lu une fois quelques-uns des classiques de l’auteur (ou qu’il a souvent croisé sur son petit écran ou au cinéma, l’une des nombreuses adaptations de ses romans).
Passage et arrêt buffet prolongés de tout amateur de littératures science fictives, tout comme dans un registre certes différent il en est de H. G. Wells, Jules Verne est la source inspiratrice, l’aiguillon créatif, de nombreuses carrières en terres SF ou fantastiques.
Plus contesté dans certains milieux littéraires bien pensant où on lui reconnaît à peine le statut d’écrivain, la lumière de l’étoile Jules Verne a souvent était éclipsée par des jugements définitifs. On ne sait trop s’ils sont le fait d’une jalousie mal placée envers son succès constant ou de véritables appréciations basées sur une étude rigoureuse de ses textes.
Certes, il s’agit d’un procès d’intention que nous ne ferons point aux amateurs de Science Fiction, généralement plus tolérants et généreux, que l’on croise sur la Yozone. Et bof, le débat est sans grand intérêt, n’occupant finalement que ceux qui ont du temps de lecture à perdre. L’Histoire et les lecteurs du monde entier ont depuis longtemps tranché la question en faveur du créateur de tant de classiques de l’imaginaire.

Car Jules Verne est un grand écrivain. Comment pourrait-il en être autrement d’ailleurs ? Et cette petite édition (par la taille) Folio 2€ le prouve sans difficultés aucunes. Deux nouvelles sont proposées. Elles ne sont ni inédites, ni introuvables via des éditions plus anciennes (chez José Corti, par exemple) mais ont le mérite de s’offrir içi pour un prix très modique (2€, c’est cool et pas ruineux !).
Deux textes radicalement différents : une œuvre de jeunesse (1854) et un récit de la maturité (1879), du fantastique romantique grand siècle et de l’aventure maritime.

Donnant tout d’abord l’impression d’avoir été écrit en quelques minutes au saut du lit (50 pages, une misère ou un footing matinal d’échauffement), “Les Révoltés de la Bounty” est un compte rendu quasi clinique d’un fait divers maritime qui passionne toujours les amateurs de grande aventure.
Dire qu’en son temps, il interrogea les consciences de son époque est un doux euphémisme. La mutinerie de cet équipage anglais et les suites qu’elle entraîna, enclenchèrent même un mouvement de réforme dans la gestion des marins de la flotte britannique. L’incident fut longuement étudié (et fantasmé) aussi bien par les élites dirigeantes que par les bons peuples qui avaient eu vent de l’affaire.
Jules Verne s’en tient aux informations en sa possession et avoue même être allé puiser ses sources directement dans les annales maritimes de la Grande-Bretagne, jugeant inutile d’en rajouter aux événements tels qu’ils se sont passés. C’est que sous l’apparente froideur du texte et sa déconcertante simplicité, on devine très vite le temps passé à étudier la chose. Jules Verne livre donc un texte court, centré sur l’essentiel (des faits, rien que des faits coco !) et démontre que l’on peut susciter l’imaginaire sans grande extrapolation mentale (ou effets de manche). Le tout à l’apparente rudesse d’une longue dépêche journalistique et s’avère un modèle de compte-rendu factuel.
On savait Jules Verne passionné par la mer, la voile et les grands voyages, on reconnaît, derrière la nouvelle, l’homme quasi hypnotisé par le sujet ainsi que l’écrivain attiré par le souci des détails justes. Or, contre toute attente, ce luxe de précisions ne fatigue pas. Au contraire, Il participe littéralement de la construction d’un imaginaire en établissant un décor géographique et mental dans lequel le rêve peut s’épanouir.
Tout au plus notera-t-on quelques jugements sur l’âme humaine, typiques d’une morale très 19ème, à la fois rigoriste et empreinte d’un fond chrétien propre à la compréhension et à la rédemption des fautes. Nul besoin d’être devin pour comprendre qu’ils ne sont en rien étrangers ou imposés à l’auteur par une obscure puissance moralisatrice. On y retrouve tout simplement les pistes que Jules Verne avait déjà développées et développera souvent autour de ces personnages romanesques.

Plus intéressante pour les passionnés d’imaginaire, “Maître Zacharius” relie la passion des machineries complexes (l’horlogerie à son paroxysme) et un fond fantastique évident. Si l’on retrouve aussi dans ce texte, que l’on pourrait qualifier de jeunesse, les tics de l’écrivain (personnages féminins simplistes et parfois caricaturaux, jeune homme courageux et plein de bons sentiments), on avoue succomber sans férir à ce conte condamnant l’orgueil de l’homme et les vaines recherches qu’il peut générer.
Les ambiances, la méticulosité des descriptions, la qualité de l’étude topographique, sont autant de réussites à mettre au profit de l’auteur. Sans parler de très belles images renforçant le caractère mystérieux et trouble de l’intrigue. Ainsi :
- “Cet homme ne vivait pas. Il oscillait à la façon du balancier de ses horloges...Comme les tableaux de Léonard de Vinci, il avait poussé au noir”.
Incontestablement, un climat s’installe et saisit celui qui se plonge dans le récit.

Le final de “Maître Zacharius”, paroxystique, est sans pitié.

Faciles à lire, dépaysantes, ces deux nouvelles présentent des aspects méconnus de l’œuvre de Jules Verne, valent le détour et rendent ce poche aussi intéressant aux passionnés du maître qu’à ceux qui auraient une dent contre lui.

Titre : Les Révoltés de la Bounty
Auteur : Jules Verne
Nouvelles : Les Révoltés de La Bounty (1879), Maître Zacharius (1854)
Couverture : Greg Pease/Getty Images (photo)
Éditeur : Gallimard
Collection : Folio 2€
Catégorie : F1
Sites Internet : Centre International Jules Verne
Pages : 111
Format (en cm) :
Dépôt légal : décembre 2007
Code Hachette : A 34956
EAN : 9 782070 349562
ISBN : 978-2-07-034956-2
Prix : 2€

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Stéphane Pons
30 janvier 2008


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Les révoltés de La Bounty (Gallimard, coll. Folio SF, décembre 2007, 2€).



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