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Lune n’est pas pour Nous (La)
Johan Heliot
Mnémos, roman, uchronie, mars 2004, 312 pages, 18 €

Autant le précédent opus, façon steampunk, pouvait emporter l’adhésion, et même l’enthousiasme, pour le sympathique message qu’il véhiculait, autant cette suite, 20 ou 30 ans après, peut décevoir.



Passe encore pour l’écriture à la Léo Mallet, avec l’argot de l’entre-deux guerres, mais sans la sècheresse ni l’efficacité naturelle de l’original. Passe encore pour les références et les clins d’œil un peu facile aux acteurs de cinéma de cette période, du génial Carette à la jeune Darrieux. Passe encore pour la transformation de l’ignoble flic Jaume en Maigret mâtiné de Bourrel (« Bon sang ! Mais c’est bien sûr... »), soudain devenu intelligent et sympathique. Mais les péripéties racontées, si elles surfent sur l’invraisemblance acceptable sur les 200 premières pages (après tout, on voyage dans une fiction), sombrent dans l’accumulation de faits incompréhensibles sur la fin.

Même les personnages célèbres invoqués ne sont plus à leurs places et y jouent des rôles incompatibles avec ce qu’ils étaient de leur vivant. Léon Blum et Trotski sont devenus des alliés des Sélénites alors qu’ils ont toujours combattu les thèses libertaires (et pas qu’un peu dans le cas de Trotski, rappelez-vous Cronstadt). Le génial Heisenberg est transformé en père de la bombe A (avec A pour Adolf !). Einstein fait partie des gentils, évidemment, et trouve une solution complètement improbable à la disparition de la Lune sous les bombes atomiques.

De surcroît, pas de chance, l’exemplaire reçu en service de presse avait en double les pages 225 à 256, et il manquait les pages 193 à 224. Ce qui fait que, quand Léo transformé en Goëring rencontre le vrai aux toilettes et que la bagarre s’enclenche... On retrouve von Stroheim découpé en petits morceaux par Mengélé et Léo, transformé cette fois en SS de base, qui vient le ressusciter dans son bocal grâce au symbiote d’Albert Londres (!).

C’est sans doute dans ces pages manquantes que sont explicitées les références à un grand de la littérature fantastique, Hans Heinz Ewers, qui semble apparaître comme un créateur d’uchronie inverse renvoyant à notre monde. En espérant se tromper...

Les Ishkiss, entités extra-terrestres mal définies, qui constituent la base d’un « Amalgame » de pensées recouvrant toute la face cachée de la Lune, peuvent, non seulement intégrer la conscience des morts, mais encore ressusciter les décédés à titre individuel. Il y a des Ishkiss indépendants, lucioles transportant l’information ou cerveaux de nefs stellaires, ou membres de l’Amalgame, mais aussi symbiotes individuels, à la façon des Go’a’ould de Stargate SG-1, qui peuvent redonner la vie à leurs hôtes, et, en plus, les transformer en n’importe qui d’autre, et encore tailler le bout de gras ou la bavette (pour rester dans l’ambiance) avec leur hôte humain.

Entre too much et n’importe quoi, même un lecteur a priori bien disposé finit par saturer.

Le message libertaire de La Lune seule le sait a complètement disparu au profit d’un jeu de l’auteur avec des personnages, l’érudition historique et littéraire n’étant plus que prétexte. Dommage.

Titre : La Lune n’est pas pour nous
Auteur : Johan Heliot
Couverture (souple) : Manchu
Éditeur : Éditions Mnémos, 15 passage du Clos-Bruneau, 75005 Paris
Collection : Icares
Pages : 312
Format (en cm) : 21,5 x 13 x 2,6
Dépôt légal : mars 2004
ISBN : 978-2-915159-15-7
Prix : 18 €

DOSSIER UCHRONIE



- L’uchronie, renouveau de la SF ? (Maître Sinh)
- Interview exclusive de Johan Heliot (Stéphane Pons & Hervé Thiellement).
- « La Lune vous Salue Bien » (T3) chez Mnémos (Hervé Thiellement et Stéphane Pons)
- « La Lune n’est pas Pour Nous (T2) » (Folio SF) (Stéphane Pons)
- « La Lune n’est pas Pour Nous (T2) » (Mnémos) (Hervé Thiellement)
- « La Lune Seule le Sait » (Mnémos et Folio SF) (Hervé Thiellement)


Hervé Thiellement
2 novembre 2007


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