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Rule of One (the), tome 2 : The Rule of Many
Ashley & Leslie Saunders
La Martinière, Fiction J, roman (USA), anticipation, mars 2020, 414 pages, 17,90€

Réfugiées au Canada auprès d’une amie de leur mère, pilier de la Commune, les jumelles peaufinent leur contre-attaque. Tandis que leur grand-mère multiplie les attaques directes contre le gouverneur Roth, elles rencontrent des alliés potentiels... et des traîtres ! Ava et Mira décident alors de brouiller les pistes et de se séparer. L’une ira recruter les soutiens parmi les sénateurs américains pour contrecarrer les ambitions présidentielles de Roth, l’autre va aller chercher son fils, Alexander, le père d’Halton, mystérieusement disparu de la circulation.



Dans ce second tome, les sœurs Saunders reprennent les mêmes bons et moindres ingrédients. Du côté des bons, une narration en page-turner qui devient d’autant plus intéressante que les jumelles se séparent et que de nouveaux personnages (Haven, une esclave & Owen un ouvrier programmeur) apportent un autre regard sur l’intrigue. Dans le moins bien, la chronologie est assez hachée, avec parfois de grandes ellipses, un choix net pour le tout-spectacle et tout-émotion, mais surtout des situations grand-guignolesques et des retournements incroyables, littéralement. La fin sera marquée par de très grosses ficelles, comme ne pas achever le Grand Méchant tout de suite, lui laissant le temps de faire du dégâts et de s’enfuir, pour permettre un 3e et dernier tome.

Avec Zee/Haven et Owen, on en découvre un peu plus sur cette Amérique post-catastrophe climatique. La première est esclave dans une usine d’algues où les gardiens sont particulièrement sadiques. Si on comprend que l’économie alimentaire du Texas repose sur ces usines et le travail forcé de tous les écartés, les dissidents, pourquoi laisse-t-on les gardiens s’en prendre à la main-d’œuvre ? Ce n’est guère logique.
Owen est programmeur chez Kismet, fabricant de voitures autonomes. Lorsque la Commune attaque pour voler des véhicules, par un réflexe bête il leur emboîte le pas. Immédiatement identifié, il est déclaré hors-la-loi et reste avec Rayla. C’est l’occasion d’une prise de conscience et d’une adhésion aux valeurs de la Commune. Pilotant une voiture blindée, il va devenir, pour les quelques jours que durent ce volume, le bras droit de l’irascible grand-mère résistante.
Bon, là encore, de grosses incohérences : la cavalerie mécanique volée par la Commune a besoin de carburant, une denrée ultra-rare et précieuse, mais cela ne leur pose pas de problème de traverser tous les USA. Tout comme cela ne pose pas de problème à Roth de déployer une armée aéroportée sur les états voisins, dévoilant des ressources très biens cachées, ou un coup de poker comme Poutine en Ukraine. Encore une fois, les écarts de technologie demanderont de mettre en veilleuse son incrédulité, mais ce n’est pas toujours facile. Idem de ces voitures bardées de technologie, piratées si facilement mais impossibles à tracer par les autorités.

Le plus difficile à avaler reste sans doute la profusion de jumeaux cachés, comme si la catastrophe avait hypertrophié cette capacité aux doubles naissances. Alexander a pour sa part un deuxième enfant, raison de son exil, et les sœurs comptent bien retourner cela contre Roth : son propre fils n’a pas respecté la loi !

Dans un élan de révolte, les forces de la Commune grossissent d’alliés qui se rangent derrière elle en découvrant les ambitions démesurées et dictatoriales de Roth. Dans un bel esprit américain, on voit sénateurs et généraux rester fidèle à l’État jusqu’à ce que vraiment, il devienne impossible de s’aveugler davantage. Cela n’en rend l’assaut final que plus navrant : Austin est prise sans mal, puisque la Garde rejoint les rebelles, mais le dernier bastion nécessitera d’envoyer les héros en première ligne, évidemment.

Je ne vous parle pas des petites histoires d’amour qui naissent au milieu de toute cette cavalcade, ces fuites dans le désert, entre les mines, par les égouts... La plus intéressante est celle de Mira et Theo, le petit-fils de Roth qui vient de découvrir son horrible ascendance et s’y oppose. Cela participe à la redécouverte de la liberté de vivre des jumelles et apporte une respiration au milieu de tout ce stress. Ou plus de stress, sachant le danger qui les entoure. Un truc classique mais efficace.

Comme dans toute dystopie américaine grand public, les autrices ont largement dosé les bons sentiments, un patriotisme qui s’enflamme face à la dictature, fidèle aux antiques valeurs du pays, ce qu’il faut de diversité pour satisfaire tout le monde (au point que les personnages secondaires soient assez caricaturaux, selon leur couleur de cheveux, leur ethnie ou leur orientation sexuelle), et une charge sans finesse contre les idées conservatrices. Mais voilà, tout cela manque un peu de finesse et si ces 400 pages se lisent vite, c’est davantage par leur découpage que par l’identification aux héroïnes ou l’adhésion à l’intrigue, cousue de fil blanc et purement spectaculaire.

Un bon divertissement donc, sans plus, qu’on imagine sans mal adapté sur grand écran, où les plans saccadés de caméras et les explosions masqueront faiblesses et incohérences.

Plus qu’un pour connaître la fin.


Titre : The Rule of Many (The Rule of many, 2019)
Série : the rule..., tome 2/3
Autrices : Ashley et Leslie Saunders
Traduction de l’anglais (USA) : Isabelle Troin
Couverture : non créditée
Éditeur : La Martinière Jeunesse
Collection : Fiction J
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 414
Format (en cm) : 21,5 x 14,5 x 3
Dépôt légal : mars 2020
ISBN : 9782732491110
Prix : 17,90 €



Nicolas Soffray
20 juillet 2022


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