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Entretien avec Claire Conan
Claire Conan, illustratrice du jeu « Chakra » - Blam !
19 avril 2021

Les illustrations de l’excellent jeu « Chakra » édité par Blam ! sont une invitation au voyage spirituel. La beauté et la poésie qui s’en dégagent appelleraient à la méditation. Comment ne pas chercher à mieux connaître la responsable de ces magnifiques illustrations ? Impossible !
Nous avons donc invité Claire Conan à nous dévoiler ses secrets de zénitude...



Vous travaillez dans l’animation en 3D pour des séries ou des films. Quel a été votre parcours pour y parvenir ?

J’ai toujours plus ou moins su que je souhaitais m’orienter vers une profession artistique. En sortant du bac, j’avais suivi des ateliers de dessin/peinture pendant plus d’une dizaine d’années, ce qui m’avait donné un goût prononcé pour l’art sous toutes ses formes. C’est durant mon année de prépa arts appliqués (Manaa), que mon projet professionnel s’est affiné vers le dessin animé et l’animation 3D. J’ai alors poursuivi ma formation à l’Ecole Pivaut de Nantes, dont je suis sortie diplômée 3 ans plus tard, en 2017.

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Quelles sont les techniques graphiques que vous utilisez ?

Lorsque je dessine, je préfère toujours entamer mon travail préparatoire en technique « traditionnelle » c’est à dire, sur papier, afin de garder une certaine spontanéité dans mon trait. Je passe ensuite généralement en techniques numériques pour l’encrage, puis la mise en couleurs. Sur certains projets qui le nécessitent, je fonctionne aussi en méthode « hybride » ou je récupère par exemple des lavis d’aquarelle scannés puis retravaillés par ordinateur pour apporter du contraste et du détail. Cette méthode me permet de conserver le rendu accidentel d’une technique humide comme l’aquarelle que l’on ne contrôle pas totalement, tout en autorisant la correction de certains aspects.

Comment êtes-vous parvenue dans le monde de l’illustration de jeux ?

En sortant d’études, je ne pensais pas faire de l’illustration mon projet professionnel, mais poursuivais malgré tout des projets personnels pour le plaisir. J’en postais de temps en temps sur mon book en ligne, et c’est de cette façon que j’ai un jour été contactée par Blam !. Ils étaient tombés sur une geisha à tête de lotus en pleine cérémonie du thé, faisant partie d’un triptyque de tableaux sur le thème du Japon. Vous l’aurez compris, il s’agissait de l’illustration qui a été à l’origine de « Chakra ».
Contrairement à un projet classique, ou l’on passe d’abord par une étape de recherche, nous avons donc ici pu partir directement de l’illustration d’origine, et lui apporter quelques modifications.

Le monde du zen et des chakras vous était-il familier ou êtes-vous arrivée dans l’inconnu ?

Je ne suis pas du tout experte sur le sujet. J’ai beaucoup appris grâce au jeu et aux gens qui ont travaillé sur sa mécanique.

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Comment s’est déroulé votre travail avec l’auteur ? Avec l’éditeur ?

Je n’étais pas en contact direct avec l’auteur, Luka Krleza, car la maison d’édition servait d’intermédiaire. J’ai en revanche été en contact constant avec Blam ! pour valider le travail d’illustration, notamment au moment où il a été décidé que chaque plateau de jeu représenterait différentes ethnies. Nous échangions alors régulièrement pour valider des pistes, opter pour une version plutôt qu’une autre etc.

Quel degré de liberté aviez-vous sur votre travail ?

J’ai eu le sentiment d’être assez libre sur les propositions que je pouvais faire sur l’ensemble du projet, bien que chaque étape se faisait en consultation directe avec le Directeur Artistique. En général nous validions ensemble un premier croquis, puis la version sans couleurs et enfin la version finale colorisée pour chaque plateau.

Quelles ont été vos inspirations graphiques pour retranscrire la zénitude des personnages des plateaux ?

J’ai surtout effectué un travail de recherches pour me renseigner sur chaque région du monde représentée (Inde, Polynésie, Europe centrale, etc.) dans le but d’apporter des éléments symboliques forts les représentant au mieux et les distinguant les unes des autres.

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Vos illustrations ont-elles parfois eu une influence sur des modifications du jeu ?

Je ne pense pas que cela ait eu une quelconque influence sur la mécanique qui est généralement déjà bien établie au moment de travailler sur l’illustration. En revanche, l’illustration permet de donner une « teinte », un univers parfois très différent de ce qui était imaginé à l’origine par l’auteur ou l’éditeur.

Illustrer ce jeu vous a-t-il permis de canaliser vos énergies et de vous purifier ?

Je tâcherai de me remémorer cette question à ma prochaine montée de stress de fin de projet.

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Comment s’est déroulé votre travail sur le jeu « Hagakure », réalisé pour Studio H ?

La démarche a été assez différente : contrairement à « Chakra », il fallait créer l’univers du jeu et imaginer le style graphique de A à Z. Studio H m’a d’abord laissé carte blanche pour la réalisation d’un personnage (celui de la couverture), puis nous avons progressivement conçu chaque villageois et samouraïs, avec ce principe de gradation de la carte la plus faible à la plus forte. Je me suis beaucoup documentée sur la société du Japon féodal pour trouver les diverses tenues et accessoires de l’époque, ce qui m’a beaucoup plu. J’ai particulièrement apprécié le travail de recherche sur les 3 vieux Fous, qui étaient les personnages sur lesquels nous avions le moins de visibilité au début : on m’avait seulement indiqué qu’ils s’agissait de personnages « loufoques, étranges, mystiques et puissants », ce qui m’a donné envie de partir sur de vieux sages aux pouvoirs issus de symboles nippons comme la fleur de cerisier, les lanternes et la calligraphie. Nous avons travaillé durant environ 2 mois pour la création de l’ensemble des personnages, qui ont ensuite été mis en page sur les cartes par un directeur artistique qui a construit tout le design graphique du jeu (ornements des cartes, de la boîte, jetons).

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Vous évoluez dans l’animation. Quelles sont les différences de travail entre cet univers et celui du jeu de société ?

Ce sont deux secteurs très différents à tous points de vue, et notamment dans leur façon de fonctionner : la principale différence serait selon moi le nombre d’intervenants sur un projet. Un jeu de société constitue en général le travail d’une équipe composée de l’éditeur, l’auteur, l’illustrateur, le DA, le distributeur... Plusieurs interlocuteurs donc, mais qui limite le nombre d’intervenants au final. Dans le secteur du cinéma d’animation, selon le projet (long métrage, série, pub..), on peut avoir des équipes allant d’une cinquantaine à plusieurs centaines de personnes. Et ce, pour une durée relativement longue, un long métrage d’animation mettant par exemple environ 4 à 5 ans à voir le jour.
Une autre différence que j’ai pu constater concerne la durée de vie d’un projet. J’ai découvert que le milieu du jeu permettait une notoriété assez longue aux projets lancés par les maisons d’édition : un jeu sorti 2 ou 3 ans auparavant pourra toujours faire parler de lui s’il a plu au public et continue d’être distribué.
Dans le cinéma d’animation, les choses vont plus vite : on mise par exemple beaucoup sur la sortie en salle pour les films diffusés au cinéma, ou sur les premiers mois de sortie pour un projet diffusé sur plateforme ou chaîne télé. Cela peut paraître assez frustrant de s’investir autant dans un projet qui ne sera sur le devant de la scène que sur une courte période avant d’être remplacé par un autre plus récent, mais cela contribue peut-être à l’émulation qui se produit au sein d’une équipe de film.

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Quels sont vos univers créatifs de prédilection ?

J’aime avant tout créer des personnages de toutes sortes. Mais si l’on regarde mon book, je pense que l’on visualise tout de suite un univers assez doux, pastel, humoristique et un peu cartoon. Je pioche mes inspirations principales auprès de dessinateurs inspirants tels que Glen Keane, Peter de Sèves, Pernille Oerum, Loish ou encore Jun Chiu.
Je crée assez peu de décors et paysages car cela me vient rarement de façon instinctive. Le croquis que je vais réaliser sans réfléchir, dans le train ou en vacances sera souvent un personnage humain ou animal tiré de mon imagination et des inspirations qui m’influencent.

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Avez-vous l’illustration d’un autre jeu en vue ?

Pas dans l’immédiat, mais, ce n’est pas impossible, nous verrons si les planètes s’alignent. Affaire à suivre…


2 jeux conseillés par Claire Conan :

- « Totem » : Un jeu de cartes découvert au Festival International du Jeu (FIJ) de Cannes en discutant avec la créatrice elle-même, dont le but est de déterminer à chaque tour l’animal totem d’un joueur par l’intermédiaire de cartes « qualités/atouts ».
J’adore faire découvrir cette petite pépite autour de moi car elle provoque souvent beaucoup d’à priori (« mouais… ça a l’air un peu niais comme jeu », « je n’aime pas trop exprimer mes sentiments envers les autres"). Mais au final, on remarque très vite que les joueurs se laissent prendre au jeu sans le vouloir, peut-être par curiosité refoulée de savoir ce que les autres pensent d’eux ? En tout cas, la magie opère toujours de la même manière, provoque fou rire, émotion, larmes et vague d’amour, non négligeable en cette période. J’ajouterais qu’il n’est pas indispensable de jouer avec des proches : ma 1ere partie s’est faite avec des gens que je connaissais seulement depuis quelques jours. Cela n’a pas empêché chacun de partager ses impressions sur les autres, permettant ainsi de fournir un avis plutôt basé sur la 1ère impression que l’on dégage. Je recommande vivement ;)

- « TTMC (Tu Te Mets Combien ?) »  : Un jeu de plateau basé sur la culture générale, qui n’est pas sans rappeler les « Trivial Pursuit » de notre enfance. Très bon jeu pour des vacances ou week-ends en famille. J’aime surtout le principe d’auto-évaluation assez malin du jeu, où l’on doit juger ses connaissances sur un domaine avant d’en connaître la question précise.


Illustrations © Claire Conan & Blam ! & Studio H


Michael Espinosa
Christelle Espinosa
20 avril 2021



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