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Ce qu’ici-bas nous sommes
Jean-Marie Blas de Roblès
Zulma, roman (France), aventure/récit de voyage/fantasmagorie, 276 pages, août 2020, 20€

Perdu dans le désert en compagnie de son ami Hamza, Augustin Harbour parvient par miracle dans la cité de Zindān qui n’apparaît sur aucune carte. Il est accueilli à bras ouverts et logé dans une maison dont le propriétaire vient de décéder. Les habitants semblent originaires de n’importe où et de n’importe quand, comme en témoignent ceux qui sont recueillis après lui alors qu’ils avaient abandonné tout espoir de survie. Zindān s’avère un étonnement permanent pour Augustin, ainsi qu’une énigme perpétuelle avec ses drôles de coutumes et surtout la présence de rien moins qu’un Dieu y descendant tous les jours. Quitter cet oasis est-il seulement envisageable, voire possible ?



« Ce qu’ici-bas nous sommes » n’est pas un livre comme un autre. Il suffit de le feuilleter pour se rendre compte des nombreuses illustrations donnant corps au texte, Jean-Marie Blas de Roblès joint l’image aux mots pour que le lecteur se rende mieux compte de ce que doit affronter Augustin. C’est d’autant plus remarquable que l’essentiel des illustrations est de son fait et qu’elles apportent un indéniable cachet à un récit incroyable aux allures de carnet de voyage. Des personnages hauts en couleurs, des objets étonnants, des animaux, des constructions, des paysages... parsèment ces pages et la comparaison avec un cabinet de curiosités s’invite d’elle-même, tant la présence de certaines choses apparait saugrenue.

Augustin met tout son cœur, toute sa raison à rédiger ses impressions, à partager ses découvertes de cet étrange lieu perdu dans le désert, visiblement hors du temps et de l’espace. Avec le lecteur, il s’adresse à un converti, pas comme avec les médecins en charge de la clinique luxueuse dans laquelle il se trouve au Chili. Jugé schizophrène, Augustin cohabite avec Aby, celui qui doit faire une conférence témoignant de sa santé mentale. Ces jours à Zindān ne sont-ils finalement que belles inventions ? Qui a fait cet étonnant voyage : Aby ou Augustin ? Lequel des deux raconte le séjour hospitalier ?
Bien des questions s’imposent suite à la compréhension de la situation présente du personnage central.

Blas de Roblès joue habilement du doute, il offre un autre regard sur l’ensemble : plus critique, moins apte à tout accepter, même si la douce folie qui règne dans Zindān s’avère particulièrement jouissive par son imaginaire. La vie de tous les jours dans cette cité n’est qu’évasion pour le lecteur avec ses quartiers répartis entre clans des Amazones, des Mangeurs de crevettes, des Trayeurs de chiennes et du Jujubier. Chacun avec ses personnages clés et pour le moins loufoques : roi avec trône qui n’est autre qu’une toilette, balayettes cérémonielles qui sont en réalité des balais chiottes. Chacun avec ses coutumes extravagantes, ses cultes à des idoles pour le moins controversées... Chaque chapitre amène son lot d’exotisme, avant d’être ponctué par un retour au présent dans la clinique.

« Ce qu’ici-bas nous sommes » dégage une belle inventivité, souvent en décalage avec notre société. Les signes parleurs ou QûmRan Code ne sont autres que nos actuels QR Code, les retranscriptions de conversations se font sur des poteries... seuls quelques initiés peuvent décoder ses signes. Rien de technologique là-dedans, même si le rapport avec notre quotidien est immédiat. L’auteur joue entre l’ancien et la modernité, donne un air de déjà-vu à ces belles trouvailles. Et toujours l’image qui vient appuyer les dires, apporter une certaine légitimité à cette expérience qui peut être qualifiée de fantasmagorique.
Et ce Dieu auquel Augustin ne croit pas ? Mystification ou vraie déité ? Ce qui est sûr, c’est que son envoûtante vestale Maruschka Matlich a ensorcelé notre bonhomme après qu’il ait découvert la nature de ce Dieu.

« Ce qu’ici-bas nous sommes » s’avère un plaisir de l’esprit comme des yeux. Jean-Marie Blas de Roblès allie avec maestria images et mots pour mieux jouer avec le lecteur en lui offrant un grand voyage en territoire fantasmagorique. Personnages truculents, inventivité constante avec un air de déjà-vu, car le moderne s’invite dans l’ancien et constitue autant de clins d’œil pour le moins jouissifs, ce roman amène chacun en territoire inconnu où rien ne semble impossible, où la raison n’est pas forcément la meilleure arme pour l’affronter.
Une lecture divertissante et jubilatoire qui n’est pas sans trouver par son décalage des échos dans notre société moderne, comme pour mieux la démystifier.


Titre : Ce qu’ici-bas nous sommes
Auteur : Jean-Marie Blas de Roblès
Couverture : David Pearson
Éditeur : Zulma
Sites Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 276
Format (en cm) : 15,3 x 22,8
Dépôt légal : août 2020
ISBN : 9782843049712
Prix : 20 €


Jean-Marie Blas de Roblès sur la Yozone :
- « La Montagne de minuit »

Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
19 août 2020


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