C’est donc ce roman de Eiko Kadono qui a inspiré Hayao Miyazaki au début des années 1990. Dans cette seconde partie, Kiki a besoin de vacances, souffre un peu de la distance avec ses parents, elle ne comprend pas trop son ami Tombo, et les sentiments qui les lient (ou pas), et elle se pose beaucoup, beaucoup de questions sur les gens, la vie et sa place au milieu de tout cela.

Chaque chapitre est une « livraison », souvent haute en couleur, car en fait les gens font appel à la petite sorcière pour tout ou rien... Cela va de la soigneuse de zoo qui lui fait porter un petit hippopotame jusqu’à la clinique vétérinaire, à la jeune maman qui qui demande de retrouver son mari explorateur dans les îles de l’archipel.

Il convient de ne pas perdre de vue plusieurs chose à la lecture des « racines de la magie » : Nous avons affaire à un ouvrage qui a presque 30 ans, et d’une culture totalement différente de la nôtre, avec ses codes narratifs propres. Ainsi, il n’y a presque pas de descriptions, ni des lieux, ni des gens. La narration se limite à l’action, aux faits et gestes, additionné de beaucoup de dialogues eux aussi pauvres en incises mais riches de ponctuation ! C’est à la fois très enfantin et pas si loin d’un script, nous laissant très libre dans la façon de le réaliser.
Les lecteurs familiers des animés des années 90, de « Panda petit panda » et de l’adaptation de Kiki n’auront pas de mal à se bâtir des décors, de voir gesticuler des personnages souvent archétypaux, les autres pourront être un peu déboussolés devant ses clients qui vont naviguer la pauvre Kiki d’un bout à l’autre de la vie, voire du pays. Parfois en disant à peine merci ! Sous les raccourcis de littérature destinée aux plus jeunes, on décèle de grands trous qu’il faudra combler soi-même.

Mais chaque chapitre est aussi une petite leçon de vie, parfois simple (souvent qu’aider les autres gratuitement améliore le monde), parfois plus profonde (faire des compromis pour être heureux). Si les premiers chapitres semblent s’enchaîner sans guère de lien, l’accumulation des rencontres construit la psychologie de Kiki, l’aide à devenir une jeune adulte et comprendre ce qu’elle veut faire de sa vie : aider les autres, plus qu’en livrant des choses, car derrière chaque livraison qu’on lui confie, il y a un petit malheur à résoudre. Elle n’est pas qu’une factrice, elle est une sorcière, même débutante, qui guérit les âmes de ses clients, parfois avec maladresse, mais toujours avec sincérité.
Et grandit peu à peu, erreur après erreur, leçon après leçon.
Choix après choix.
Car grandir, c’est cela.

Je pense qu’on aura une lecture différente de « Kiki » selon notre âge : les plus jeunes (dès 8-9 ans pour les bons lecteurs, car le texte est très accessible) apprécieront les petites aventures de la sorcières, les péripéties amusantes, les plus âgés, s’ils ne butent pas sur le style très différent de nos habitudes, goûteront sans doute les petites leçons douces-amères auxquelles ils auront peut-être été eux-mêmes confrontés.

Dans les deux cas, cela redonne envie de voir le long-métrage !

Titre : Les Racines de la Magie (Majo no Takkyû-bin 2 : Kiki to Atarashi Mahô, 1993
Série : Kiki la petite sorcière, tome 2/2
Autrice : Eiko Kadono
Traduction du japonais (Japon) : Déborah Pierret Watanabe
Couverture : Sébastien Rost
Éditeur : Ynnis
Collection : Romans
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 350
Format (en cm) : 21 x 14 x 3
Dépôt légal : mars 2020
ISBN : 9782376971214
Prix : 14,95 €