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Collectionneur de Monstres (Le)
Arthur Ténor
Scrineo, roman (France), fantasy, 184 pages, aout 2019, 12,90€

L’Académie forme les diplomates chargés de maintenir la paix dans l’empire d’Isuldain. Un groupe de jeunes élèves, la chambrée de Crépusculaires, accompagne le professeur Méléandion à la citadelle de Thémédéor. Ce dernier, collectionneur de monstres, refuse de payer la dernière livraison des Kazkares, qui ont mis le siège devant ses murs.
Pour les ados, la réussite de cette mission de paix leur permettra de passer en classe supérieure. Mais arrivés sur place, ils comprennent que cela ne sera pas facile : les deux camps cachent des choses, qu’ils sont bien déterminés à trouver, malgré le danger.



Navrant. Je n’ai guère d’autres mots. Arthur Ténor, vieux routier de l’écriture jeunesse (au temps pour le « nouveaux talents français » dont se pare Scrineo), récidive avec de la fantasy bas de gamme alignant poncifs, clichés et manque d’originalité. C’est pourtant son genre de prédilection, comme il le disait à la parution des (mauvais) « Voyages extraordinaires... » en 2006 (chez Plon).
Pour les autres nous sommes dans son univers de « L’Elfe au dragon » (Seuil Jeunesse, 6 tomes parus), publiés peu après.

Dès les premières pages, on ne se fait guère d’illusions : un avant-propos pour détailler les 3 classes de diplomates, une phrase tellement tordue à la 3e page qui contredit la page précédente (voir en pied d’article) ; une présentation des héros façon vidage de benne, des personnages variés comme un catalogue de diversité ethnique (un mage, une sorcière - qui finiront ensemble, dis-donc ! - un elfe des Songes tout doux, un demi-orque un peu brutal et une elfe des marais avec son dragon). Pourquoi ont-ils choisi de s’appeler « les Crépusculaires » ? Savaient-ils qu’ils postulaient dans une école de diplomatie et pas à Serpentard ? Visiblement non, car ce sont bien, on le découvre au fil des pages, des ados de 15 ans (ou équivalent) et qu’ils n’ont pas été très assidus en cours.

Car même si leur professeur leur rappelle que la force peut être un outil bien utile dans leur fonction, visiblement tout ce qui relève de la dialectique leur est passé sous le nez. Et c’est vraiment dommage, car il y avait là une bonne idée : proposer à la jeunesse une fantasy alternative, où on s’efforce de faire la paix plutôt que la guerre (et si possible sans assassinats de couloir), à la force des arguments plutôt que des épées. Las, ils ne sont que clichés, et foncent relativement tête baissée.

On continue avec les aberrations, comme l’elfe qui n’avait pas pensé toute seule qu’emmener son dragon chez un collectionneur de monstres assiégé par des chasseurs de monstres pouvait être, quel est le terme ? Inopportun. Des sentinelles qui se font prendre par leur propre inattention (j’en ris encore) et leurs propres camarades : c’est à dire qu’avant même l’arrivée en zone hostile, ils sont déjà mauvais !

L’ambiance dans la citadelle est un peu pesante, mais cela tient autant aux monstres croisés ou suggérés qu’à l’écriture morne et purement démonstrative de l’auteur. Heureusement qu’il n’y a que 180 pages ! Quelques ellipses et cliffhangers sauvent un petit peu de l’ennui, mais on est bien content d’attendre le chapitre 18, intitulé « la clé du mystère, hélas ! » (ceci n’est pas une blague) pour enfin comprendre quelque chose au semblant d’intrigue qui justifie les quelques rebondissements de cette affaire.

Finalement les Crépusculaires ne valident pas leur mission (non, sans rire !) et se voient « collés » 5 missions supplémentaires. c’est l’annonce de la série « L’Académie diplomatique d’Isuldain » à laquelle ce « Collectionneur de monstres » fait office d’intro non déclarée, avec une couverture bien bateau et un nombre de pages qui oscille, sur le site de l’éditeur, entre 176 et 224, de quoi, comme ici, ne pas avoir le temps de développer une belle intrigue digne du jeune public d’aujourd’hui.

Sur le fond, l’auteur nous martèle des « le monstre n’est pas celui qu’on croit » d’une affreuse banalité, ne prend le temps de s’arrêter sur rien, enchaine les poncifs « nous sommes différents mais complémentaires », « je vais aller à l’encontre de ma nature profonde » et énième « non les gars c’est à moi de le faire, pas pour réussir mais pour me le prouver à moi-même ». L’esprit d’équipe censé unir la chambrée pour toute leur carrière est absent, le dialogue entre eux proche du néant. Sans leur professeur, et des pouvoirs bien boostés qui leur sauvent la mise, et une grosse louchée de chance, on doute qu’ils en soient sortis vivants.

Si l’auteur s’est dit biberonné à Tolkien et « Conan le Barbare », on a ici la sensation qu’il a découvert la grande saga BD « Les Légendaires » de Patrick Sobral. Mais n’a pas pris le temps de la lire. Ou de lire simplement la production de fantasy jeunesse actuelle concurrente.

La terrifiante couverture de Camille Alquier n’en apparaît que plus incongrue, en totale inadéquation avec le public du roman, qu’on déconseillera aux plus de 12 ans. Voire qu’on déconseillera tout court tant l’auteur peine à insuffler un soupçon d’intérêt à une trame usée à la corde.

Non, définitivement rien à sauver.


Titre : Le Collectionneur de monstres
Série : prélude non déclaré à L’Académie diplomatique d’Isuldain
Auteur : Arthur Ténor
Couverture : Camille Alquier
Éditeur : Scrineo
Collection : 12 ans et +
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 184
Format (en cm) : 21 x 13,5 x 1,2
Dépôt légal : aout 2019
ISBN : 9782367407265
Prix : 12,90 €


Attention, à la lecture de cette page, à quel niveau sont les Crépusculaires ?

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Nicolas Soffray
6 octobre 2019


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