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Rosée du soleil (La)
Nathalie Henneberg
Éditions Gandahar, Collection Patrimoine de l’Imaginaire, roman (France, 1959), science-fiction, 2ème trimestre 2019, 252 pages, 15€

Première apparition de Nathalie Henneberg au Rayon Fantastique, « La Rosée du Soleil » connaît enfin une réédition grâce aux Éditions Gandahar. Autant dire que ce livre, demeuré jusqu’alors confidentiel, pourra désormais être apprécié par de nouvelles générations d’amateurs.



Comment évoquer, l’espace d’un instant, cet ouvrage incomparable ? La Rosée du Soleil est la planète où s’échoue un astronef terrien à l’issue d’une longue dérive provoquée par un des membres de son équipage. Quatre astronautes le composent, quatre hommes aux profils psychologiques complexes, souvent opposés, et qui vont connaître sur cet astre surprenant des destins en rapport avec leurs personnalités. Ils l’ignorent à leur arrivée, mais La Rosée du Soleil est un monde déroutant sur lequel se livre une guerre sans merci. Elle abrite différents peuples, et en particulier la race aquatique qui s’oppose aux trois autres. Agissant avec toute la perversion que permet le mal absolu, celle-ci s’emploie à subjuguer ses adversaires, usant pour cela de talents étranges qui rendent la Rosée du Soleil instable, avec des décors changeants. L’arrivée des terriens va bouleverser l’ordre des choses et provoquer l’affrontement décisif.

L’histoire en elle-même est secondaire, elle n’est que le fil conducteur qui va permettre à l’auteure de déployer son art narratif par l’évocation de ce monde et par l’approche philosophique de la dualité bien – mal. Nous vivons l’aventure à travers le prisme de la personnalité de chacun des astronautes, et ce sont autant de facettes taillées pour emporter le lecteur dans une avalanche somptueuse de couleurs, de mots, d’images de légende. Comme toujours chez Henneberg, le décor l’emporte sur l’histoire, le souffle sur l’intrigue. La richesse du vocabulaire conjuguée à la capacité à composer des paysages inédits sont les axes forts et singuliers de ce talent à nul autre pareil. Démonstration : « La quatrième – oh, la quatrième statue, Angell savait sourdement quel élément elle figurait ! Cette forme allongée et frêle était une flamme au vent ! Parmi les longs filaments d’or souple, des tresses ou des rayons, la silhouette d’onyx blanc s’élançait vers la lumière. Mais l’astronaute recula devant le visage de la déesse mystérieuse : une petite figure triangulaire, aux sourcils relevés, aux yeux d’or sableux. Un pied nu foulait l’échine d’un saurien. L’expression des traits était effroyablement barbare et cruelle… »

On sait que les livres de Nathalie Henneberg relèvent d’un l’équilibre fragile entre un allant épique russe, découlant de ses lectures de jeunesse et de ses racines, et la rationalité occidentale enseignée plus tardivement par son mari Charles. Le souffle de l’épopée transcende le récit, et le lecteur est poussé dans une vertigineuse spirale où tous ses sens sont sollicités. La lecture d’un texte de Nathalie Henneberg n’est pas un exercice facile, et l’on peut y perdre pied si l’on résiste aux mirages dressés sur sa route. Mais, si l’on se laisse subjuguer, alors l’enchantement s’empare de vous, la force contenue dans les lignes se libère et l’on mesure pleinement la qualité et la richesse de ce qui est bel et bien un chef-d’œuvre. La puissance d’évocation s’habille sous les traits de la poésie, hissant le livre à un niveau qui n’est plus celui des petites histoires de space-opéra, mais bel et bien celui, magique, du merveilleux légendaire.


Titre : La Rosée du soleil
Auteur : Nathalie Henneberg
Couverture : Chris Brigonne
Éditeur : Gandahar (Première parution : Le Rayon Fantastique, 1959)
Collection : Patrimoine de l’imaginaire
Pages : 252
Format (en cm) : 13,5 x 21,5
Dépôt légal : 2ème trimestre 2019
ISBN : 9782490504060
Prix : 15 €



Didier Reboussin
15 septembre 2019


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