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Confessions d’une Séancière
Ketty Steward
Mü, le labo de Mü, recueil (France), fantastique antillais, 194 pages, avril 2019, 14€

Dans l’Imaginaire actuel, la place des folklores locaux n’est pas bien grande face aux dragons et magiciens à boules de feu. Et pourtant... on se laisse charmer par les contes celtiques, on rit des frasques divines des mythes méditerranéens, et on en oublie le vaudou.
Ketty Steward se charge de nous rafraichir la mémoire, avec ce recueil où chaque personnage est confronté à l’étrange, parfois contre son gré, et à ses intercesseurs, tchendwazeur, féticheur ou séancière.



La grande force de ce recueil, c’est de nous immerger dans le quotidien caribéen le plus contemporain pour mieux le confronter aux superstitions qui demeurent dans les îles. Chaque histoire narrée par Ketty Steward a le goût du conte moral et les épices d’une histoire typiquement antillaise, mâtinée de dialogues en créole (le dernier texte est même entièrement en créole !) : on y croise les travers des hommes et des femmes, envie, jalousie, colère, désespoir, peur. Certaines pourraient sembler anecdotiques, trames fantastiques vues et revues, mais le terreau fertile local y donne tout de suite davantage de corps, comme une fièvre communicatrice. La langue, le phrasé jouent également en ce sens.

Ainsi d’une jeune fille, Marie-Odile, dans “Pié pou tet”, qui BTS en poche passe par l’ANPE pour trouver une place dans une entreprise... de pompes funèbres, et à la suite d’un bizutage se croire maudite, atteinte du « Croque-retour » pour avoir essayé un cercueil. Ou de ce jeune homme qui rencontre l’amour de sa vie, un soir de fête, et découvre le jour suivant, en allant faire sa demande, qu’elle était un fantôme.

Mais la magie n’est pas toujours subie : parfois, elle est invoquée, comme dans “l’Homme-Baton”, où un garçon timide demande l’aide d’un féticheur pour séduire des femmes, se changeant en violeur en série avant d’être rattrapé par une contre-magie blanche.
L’autrice ne prend pas position pour un genre ou l’autre : hommes et femmes sont dans ces histoires capables du meilleur comme du pire. Cependant, on constatera que ce sont plus souvent les sorciers qui pratiquent la magie noire, dominatrice, au bénéfice d’autres hommes, et à l’inverse, les séancières qui désenvoûtent leurs semblables.

Ce recueil ne sonne à nul autre pareil, le soleil caribéen de certaines scènes très souvent éclipsé par des nuits d’encre et de fièvre. Ketty Steward fait siennes, et nôtres, des situations souvent banales que l’emploi de la magie noire ou la foi en son pouvoir rendent troubles, source d’un malaise plus ou moins diffus qui noue le ventre. N’est-ce là que la magie de la littérature ? ou y a-t-il autre chose ? Plusieurs mois après l’avoir lu, en tout cas, certains passages me « hantent » encore.


Titre : Confessions d’une séancière
Auteur : Ketty Steward
Couverture : J-E Aubert / Mü éditions
Éditeur : Mü éditions
Collection : le labo de Mü
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 194
Format (en cm) : 18 x 13 x 2
Dépôt légal : avril 2019
ISBN : 9782490239047
Prix : 14 € inclus la version ePub (ou ePub seul : 4,99€)



Nicolas Soffray
11 août 2020


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