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Chroniques de Zi (les), tome 3 : Turi
Jean-François Chabas
Nathan, roman (France), fantasy, mars 2019, 263 pages, 15,95€

L’Ogre a été vaincu, mais les dangers guettent encore Nara, Phelan et Turi. Des créatures effacent une partie de la mémoire du garçon aux cheveux bleus, lui rendant ses exploits passés encore plus incroyables. Puis c’est une autre maison ensorcelée qui fait écho aux trois souris croisées par Phelan à l’aller... Enfin, la côte atteinte, la route pour le Royaume des Trois Vagues ne sera pas une croisière d’agrément. Il faudra tous les talents de la princesse pour surmonter les périls. Mais cela sera-t-il suffisant ?



Après « Phelan » et « Nara », l’intrigue est cette fois centrée sur Turi. On a précédemment appris la véritable identité du jeune homme aux cheveux bleus, et les raisons de ses capacités exceptionnelles. Mais le peu de conscience qu’il en avait lui est subtilisé.
Mais alors que Nara a échangé sa malédiction contre une capacité de guérison fort pratique, puisque les deux garçons passent leur temps à se blesser, un nouveau poison s’insinue dans le trio : la jalousie.
Car tout auréolé de sa victoire sur le géant, Turi, l’ami fidèle, s’estime désormais l’égal de Phelan et de ses rêves de gloire. Et donc digne de la princesse.
Qui pour sa part, n’en a rien à faire de ces deux coqs. Voire coquelets.

On en avait déjà un solide aperçu dans « Nara », la jeune princesse a un caractère bien trempé, et sa malédiction l’a rendue fortement indépendante. Elle n’a qu’un objectif : rentrer chez elle et rassurer sa famille sur son sort. Trainer ces deux boulets roucoulants, tantôt lâches, tantôt fanfarons, est un fardeau. Ils sauront parfois calmer son impétuosité, mais plus souvent, leurs chamailleries lui donneront des maux de tête.

La route vers les Trois Vagues confronte le trio à l’océan, et à des créatures issues d’un bestiaire que les garçons ne connaissant pas. Tout reposera encore sur Nara et sa capacité innée à se faire obéir. La traversée prend un tour inattendu et une confrontation directe avec les mythes des Trois Vagues, et une ascension surréaliste très originale, dans la lignée des mythes indo-européens, avec une pointe de folie digne du « Baron de Munchausen ». Et un bouchon de lavabo. Nos héros, trop effrayés par les événements, encaissent plutôt bien l’ubuesque situation.
ET ils vont de mal en pis avec un atterrissage en pleine contrée sauvage, remplie de cannibales et autres dangers exotiques.

L’humour reste très présent malgré les dangers et les calamités auxquels sont confrontés nos trois héros. Et il est le bienvenu pour réduire la tension qui nait de chacune de leurs rencontres. Le caractère très entier de Nara l’aveugle lors de leur traversée du village maudit, malgré les mises en garde de Phelan. A l’inverse, son émerveillement dans l’exploration du continent sud contraste avec la terreur des garçons face à un univers dont ils ignorent les dangers quasi omniprésents. Et l’auteur qui se plait à faire de gentils crapauds des créatures mortelles ! Ou de petites allusions qui n’échapperont pas aux lecteurs, comme la joie de Nara de voir la vie en rose, effet secondaire d’un champignon permettant la vision nocturne.
Jean-François Chabas joue pour la troisième fois à merveille ce décalage entre les dialogues de ses trois jeunes héros, très légers et pleins de répartie, et la complexité de leurs sentiments, la puissance de leurs émotions parfois contradictoires. Ainsi, Turi est-il jaloux de Phelan, mais ne peut se résoudre facilement à lui tourner le dos et trahir son meilleur ami de toujours. S’ils veillent les uns sur les autres, ils tiennent autant, voire davantage, à leurs montures, l’insolent cheval Swo et la douce mule Neel.

Le découpage de l’intrigue en quatre temps évite également toute redite. Si on craint au village maudit une répétition des “trois souris”, l’auteur se joue de nous et, sur une base similaire, renverse complètement la problématique. Si les trois frères égorgeurs inspiraient crainte puis mépris, c’est ici totalement différent (et je ne vous en dirais rien). Et donc très bien joué.
La croisière, qui tourne mal, était inédite, et on l’a dit plus haut, « l’ascension » qui s’ensuit fabuleusement originale dans le paysage éditorial de la fantasy jeunesse actuel, renouant avec des formes délaissées de mythes traditionnels. La dernière part, dans la jungle, a un petit côté aventuriers façon Indiana Jones, et là encore c’est un décor assez peu présent dans les romans d’aujourd’hui.
Enfin, la fin... Un suspense encore insoutenable ! D’autant que... ! Ah, je me tais !

On l’a déjà dit dans « Phelan » et « Nara », Jean-François Chabas se trace un chemin très personnel et original dans la fantasy jeunesse, s’évertuant à ne pas nous emmener là on s’y attend. Avec « Turi », encore une fois servi par une magnifique couverture, il poursuit hors des sentiers battus, nous offrant une aventure réellement inédite.
Mais c’est dans la psychologie de ses personnages, et leur parfaite alchimie à tous les trois, que se trouve tout le sel de cette histoire merveilleuse. Trois jeunes adultes, élevés dans des doutes et des certitudes, qui les uns comme les autres volent en éclats à l’épreuve du monde.


Titre : Turi
Série : Les Chroniques de Zi, tome 3
Auteur : Jean-François Chabas
Couverture : Guillaume Morellec
Éditeur : Nathan
Collection : Roman grand format
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 263
Format (en cm) : 20 x 13 x 1,5
Dépôt légal : mars 2019
ISBN : 9782092576816
Prix : 15,95 €


« Phelan »
« Nara »
« Turi »
« Oviri »
« Chuluun »


Nicolas Soffray
30 mars 2019


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