Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Solitudes de l’ours blanc (Les)
Thierry Di Rollo
ActuSF, Les 3 souhaits, roman (France), polar fantastique, 188 pages, , 12€

C’était un contrat comme un autre, mais au moment de liquider sa cible, Marc a prononcé son nom à haute voix. Coup du sort, il y a un témoin dans la clairière, en pleine nuit, qui s’enfuit en lui volant sa voiture. Après avoir rassuré son employeur, le tueur règle le problème en quelques jours. Mais abattre ce témoin, une femme qui n’a plus toute sa tête, le dérange profondément. Ce sera le début du déclin, fait de cauchemars et d’alcool.
Plus de dix ans plus tard, une jeune femme, voleuse de haut vol, retrouve sa trace. Elle est la fille de sa victime.
C’est une histoire de vengeance, mais pas seulement...



Thierry Di Rollo aime la noirceur. Ses précédents recueils de nouvelles (« Cendres », « Crépuscules », chez le même éditeur) nous en avaient déjà donné un sérieux aperçu. Si pour beaucoup il est l’auteur du dark fantasy et post-apocalyptique « Bankgreen », il signe avec « Les Solitudes de l’ours blanc » un petit polar teinté de fantastique.
Petit, pour son épaisseur, moins de 200 pages. Mais c’est du concentré.
Si l’ouverture est classique, par une scène d’exécution, les choses déraillent vite, quand Marc se fait voler sa Jaguar et détourne... une 2CV. Du contrôle absolu, teinté d’une philosophie toute professionnelle sur la survie du plus fort (le fameux ours blanc), on passe très vite à une impro totale. Mais tout rentrera dans l’ordre, trop bien, c’en est suspect, mais à ses yeux. La reprise de contrôle est immédiate, avec un aperçu de sa vie (belle villa de location, belle escort de location aussi), et nous offre le pendant immédiat de cette vie de prédateur : une solitude que même l’argent ne peut dissimuler.

Avant de faire un bond temporel et donner la narration à la jeune femme, un bref interlude nous glace. La jeunesse de LisaMarie, teintée d’espoirs déçus, de violence et d’un déclic. Il faudra attendre les suivants pour tenter de saisir ce qui s’est emparé d’elle, pour le meilleur et le pire.

Jenny retrouve donc un Marc très diminué, alcoolique, l’ombre de l’assassin qui tua froidement sa mère. Mais c’est moins sa vengeance qui nous intéresse qu’en creux, son portrait de personne fragile, brisée, incapable de profiter de la vie. Troublant parallèle avec sa cible.
Une scène lie les deux personnages, et si à sa lecture on aura trouvé le procédé un rien facile et convenu, la façon dont Thierry Di Rollo retombe finalement sur ses pattes, bouclant toutes les boucles, est à la fois virtuose et terrifiante.
Virtuose, car on verra que rien n’aura été laissé au hasard, et que dans son écriture presque cinématographique, l’auteur rogne sa narration jusqu’à l’os, ne nous laissant que quelques passages très tendus pour mieux nous permettre de prendre la pleine mesure de l’état psychologique de ses personnages.
Terrifiante, car nulle échappatoire ne semble possible pour ses personnages. Marc était condamné, on s’en doutait dès les premières lignes, mais Jenny a hérité la malédiction de sa mère, et on en saisit toute la cruauté supplémentaire dans les dernières lignes.
Les ours blancs sont appelés à rester seuls et solitaires sur leur terrain de chasse...

Nous n’irons pas y chercher des ambitions similaires à « Bankgreen », mais voilà un très bon polar, très psychologique derrière son apparente simplicité formelle, très bien écrit, et qui jouera avec vos émotions, jusqu’à faire monter quelques larmes. Derrière la froideur de professionnels de la mort, et dans des décors ensoleillés, l’auteur nous brosse le portrait de deux âmes seules, mortes et tristes.

En appendice, un petit entretien avec l’auteur, sur sa méthode de travail, assez éclairant.


Titre : Les Solitudes de l’ours blanc
Auteur : Thierry Di Rollo
Couverture : Lasth
Éditeur : ActuSF
Collection : Les 3 souhaits
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 205
Format (en cm) : 18 x 13 x 1,5
Dépôt légal : ?
ISBN : 9782917689509
Prix : 12 €



Nicolas Soffray
25 février 2019


JPEG - 36.1 ko



Chargement...
WebAnalytics