Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Curse (The), tome 3 : The Kiss
Marie Rutkoski
Lumen, roman (USA), fantasy politico-sentimentale, 630 pages, mars 2018, 15€

Blessée, trahie, Krestel est donc condamnée aux mines de soufre par son père et l’Empereur. Là-bas, droguée, sa volonté s’érode. mais pas son espoir qu’Arin comprenne son message et vienne la sauver. Mais c’est de Verex que vient la main tendue. Hélas, trop faible, son évasion est un échec. Heureusement qu’Arin, au mépris des ordres de son allié darkan, vient la délivrer.
Mais pour le jeune Herrani, qui a ENFIN compris les sentiments de Krestel, le choc est rude : la drogue a fait perdre à la Valorienne une partie de sa mémoire. Il doit donc la réapprivoiser. Et la méfiance de Krestel ne lui facilite pas la tâche.
Peu à peu, revenue dans la maison où elle a grandi, les souvenirs reviennent, grâce aux soin de la sœur d’Arin. Mais là encore, pas facile de raconter une histoire dont on n’a qu’une vision parcellaire. Il faudra attendre qu’Arin reparte à la guerre, et un rendez-vous manqué qui brouillera encore leurs sentiments, pour que tout revienne à Krestel, qui se lance à sa poursuite.
Les deux jeunes gens se tourneront encore autour un moment avant d’enfin concrétiser leur amour, peu aidés en cela par l’humour graveleux de Roshar, le prince darkan, tandis que les escarmouches avec l’armée de Trajan, le père de Krestel, décideront de l’avenir de leurs pays. La jeune femme, anéantie par le choix de son père, est déterminée à le voir mort.



Conclusion de la trilogie avec un tome très marqué donc par la campagne militaire, dans laquelle Arin est guidé par la voix de son Dieu de la Guerre, tandis que Krestel fait montre de ses talents de stratège face à un adversaire redoutable : son général de père. Pour la jeune fille qui a longtemps tergiversé entre un mariage et une carrière militaire, comme l’obligeait la loi, avant de choisir le premier dans un pari audacieux, il s’agit de montrer à son géniteur, jamais satisfait de ses qualités, qu’il a eu tort, qu’il aurait pu être fier d’elle, mais que sa loyauté sans faille à l’Empereur lui a fait perdre ce qui lui restait de famille.
Arin, de son côté, parle de plus en plus avec son dieu, négocie, pour la survie d’une Krestel trop téméraire à son goût, mais aussi pour l’avenir de son peuple. Manipulé par Roshar, plus fin tacticien et stratège politique que lui, il endosse le rôle de sauveur des Herranis un peu à contre-coeur. Il faut dire que Krestel occupe une grande partie de ses pensées.

On est pas fâchés de les voir enfin s’avouer leurs sentiments, surtout après une première partie durant laquelle l’amnésie de Krestel a remis les choses à zéro et inversé les rôles, obligeant Arin à lui remémorer certains de ses actes, parfois cruels, que lui n’a compris qu’à la lumière tardive de ce sentiment qu’elle lui porte. Mais il en devient par la suite encore davantage protecteur, ce qui n’est pas du goût de Krestel, et ils jouent à « je t’aime, moi non plus » encore un peu.

La campagne militaire est atroce, avec un météo guère favorable (il pleut tout le temps) mais l’autrice arrive à intercaler entre deux escarmouches quelques moments calmes et tendres assez cinégéniques (la découverte du vieux temple), qui en ferait presque oublier la guerre. Il y a néanmoins de bonnes batailles, bien sanglantes et plutôt réalistes, pour nous la rappeler.

Enfin, le conflit se joue sur un pari, une fois encore (mais vous aviez compris que c’était la base de cette histoire ?) où Krestel joue un double jeu, en défiant l’Empereur à une partie de Crocs et venin à l’enjeu élevé, avec des pions truqués. Mais l’autrice joue aussi avec nous, et il y a un piège dans le piège que les plus attentifs devineront. Il n’en est pas moins excellent, et offre une scène à haute tension là encore très visuelle. Car on croyait tout perdu, et en fait...

Malgré de fréquentes tentatives de nous faire à la trahison finale de l’allié îlien, tout est bien qui finit bien, des mariages entre gens qui s’aiment, un méchant empire effondré, un méchant papa vaincu... C’est presque trop beau après les horreurs du conflit.

La trilogie de Marie Rutkoski fait la part belle aux sentiments contrariés. Difficile de s’aimer lorsqu’on appartient à deux peuples antagonistes, deux milieux sociaux différents, avec des rapports de domination plutôt sévères. Les événements n’auront guère permis à Krestel et Arin de s’avouer leur amour, et la chronologie fera même en sorte qu’ils ne l’éprouvent pas au même moment. Ou changent d’avis. Et puis ces jeunes gens sont si différents, l’une élevée dans les méandres sournois d’une société de cour un peu barbare, l’autre issu d’un peuple plus cultivé mais rééduqué par une vie d’esclave et une haine de l’envahisseur, qu’ils sont INCAPABLES de se parler directement. On a parfois (souvent)(très souvent) envie de baffer l’un ou l’autre (si Arin méritait des claques dans le tome précédent, ici Krestel ne démérite pas à la fin de sa convalescence...).
Mais ces trois volumes, au-delà de la romance compliquée, nous plongent dans trois univers totalement différent : la rébellion dans la colonie herrani, la vie à la cour valorienne, la campagne militaire. Cette variété empêche toute lassitude dans la lecture, et rend ces jeux amoureux plutôt captivant pour les lecteurs amateurs de fantasy. Si le public visé est probablement plutôt féminin, je le conseille fortement à tout jeune ado mâle qui aimerait comprendre comment fonctionne l’esprit d’une fille amoureuse dans une société complexe.
Et à toutes les filles qui cherchent un modèle, une figure forte, intelligente, retorse, mais en même temps profondément pareille à elles.


Titre : The Kiss (the winner’s kiss, 2016)
Série : The curse, tome 3/3
Auteur : Marie Rutkoski
Traduction de l’américain (USA) : Mathilde Monthier
Couverture : (identique à l’édition américaine non créditée)
Éditeur : Lumen
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 630
Format (en cm) :
Dépôt légal : mars 2018
ISBN : 9782371021570
Prix : 15 €


À lire sur la Yozone :
- The Curse
- The Crime
- The Kiss



Nicolas Soffray
22 janvier 2019


JPEG - 37.7 ko



Chargement...
WebAnalytics