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Oubliés d’Ushtâr (Les)
Emilie Querbalec
Nats Editions, roman (France), science-fiction, mai 2018, 460 pages, 18€

Apparue récemment aux sommaires de différentes revues de SFFF, Emilie Querbalec s’est distinguée par des nouvelles plutôt abouties. Le passage vers le roman étant une épreuve difficile, cette auteure avec « Les oubliés d’Ushtâr » a su la surmonter brillamment, tenant les promesses que recelaient ses premières histoires.



Je me méfie des gros pavés (celui-ci dépasse les 450 pages) dans lesquels les auteurs diluent à plaisir des intrigues qui finissent par devenir ennuyeuses. Rien de pareil ici, et cela tient tout d’abord à l’écriture soignée, agréable, riche d’un vocabulaire qui sait être poétique mais jamais pédant, adapté à la peinture de situations et de décors grandioses ou intimes. Un puissant effort de création confère aux êtres et aux choses de la consistance. On se trouve face à la construction d’un univers logique, plausible, vivant et complexe. Le soucis du détail est réel sans pour autant verser dans la maniaquerie. L’intrigue en elle-même est des plus classiques et peut renvoyer à la rigueur à « La guerre des Étoiles ». Seulement l’architecture des « Oubliés d’Ushtâr » est infiniment plus élaborée. Le traitement que fait Émilie Querbalec de cette lutte stellaire mettant en scène conquérants et peuples asservis revisite complètement ce type d’histoire. C’est la preuve que l’on peut user et même abuser des poncifs du genre jusqu’à la corde pour peu que l’on détienne une once de talent, et Emilie Querbalec n’en est pas dépourvue.

Le bien et le mal s’affrontent donc, mais ce manichéisme n’est pas l’apanage strict d’un camp ou d’un autre. Les Albâriens, lancés dans des guerres de conquêtes sont présentés tour à tour comme des brutes machistes (la procréation de leur élite n’est même pas confiée aux femmes !) ou des artistes raffinés. Ils usent d’une technologie évoluée et d’une stratégie savante. Leurs victimes, les Ushtâriens, vivent dans une société patricienne extrêmement sophistiquée, mais la plèbe se débat dans les bas-fonds et vit d’expédients. Elle est ainsi soumise à la loi de gangs dont les membres se vautrent dans la fange. Pour contrer la volonté de domination des Albâriens et sauver leur monde (une planète océan où flottent leurs cités), il existerait une solution, « L’arme-vie » qui pourrait être déposée entre les mains d’un initié. Mais où finit la légende et où commence la vérité ? La quête est lancée et nous allons suivre les aventures et le cheminement moral de la survivante d’une phalange de jeunes gens destinés à recueillir ce savoir. L’action est omniprésente, les scènes de cruauté abondent et le cadencement de l’intrigue, déroulée alternativement à travers le prisme de plusieurs personnages, maintiennent un rythme soutenu jusqu’à une conclusion peut-être un peu désordonnée. Il y a en effet quelques petites faiblesses, en particulier sur le destin en impasse de certains personnages (le frère d’Ilânn par exemple), mais elles n’altèrent pas l’équilibre global du roman.

Ce premier livre d’Emilie Querbalec est réussi. Il augure bien de la suite de la carrière de cette auteure qui a su, en peu de temps, se faire une place au soleil. Il n’est pas anodin de souligner que, grâce à la richesse et à la précision de ses descriptions, sa tonalité générale et sa capacité à évoquer tout un univers, cet ouvrage m’a fait penser au Jack Vance d’« Un Monde d’Azur ».


Titre : Les Oubliés d’Ushtâr
Auteure : Emilie Querbalec
Couverture  : Florian Moncomble
Éditeur : Nats Editions
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 460
Format (en mm) : 145 x 205
Dépôt légal  : mai 2018
ISBN : 9783958581708
Prix : 18 €



Didier Reboussin
17 juin 2018


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