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Bifrost n°90
Rédacteur en Chef : Olivier Girard
Revue, n°90, nouvelles - articles - entretiens - critiques, avril 2018, 192 pages, 11€

Ce trimestre, « Bifrost » est consacré à Edmond Hamilton (21 octobre 1904 - 1er février 1977), le père du space opera. Les quadragénaires comme moi ne manqueront pas de se souvenir avec émotions de la lecture de titres tels « Les rois des étoiles », « La vallée magique », « La ville sous le globe », la trilogie des « Loups des étoiles »... À chaque fois, un bonheur et l’envie d’y revenir. Hélas, une quarantaine de romans et plus de 200 nouvelles au compteur ne sont pas l’assurance d’une traduction en conséquence et la source s’est rapidement tarie lors de ma boulimie Edmond Hamilton.
Heureusement, l’année passée, Le Bélial’ a commencé la traduction du cycle du « Capitaine Futur », plus de 70 années après son écriture. Ce géant roux n’était pourtant pas un inconnu par chez nous, popularisé qu’il a été par l’anime « Capitaine Flam » dans les années 1980.
Que « Bifrost » rende à Edmond Hamilton un juste et touchant hommage n’est que justice.



Le dossier s’avère conséquent et débute par un morceau de choix, “Histoire d’hommes” dans lequel Francis Valéry présente l’écrivain de A à Z. Un travail très impressionnant qui met tout de suite la barre très haut et montre que si l’on pensait connaître Edmond Hamilton, il n’en était finalement rien.
Certains points de cette remarquable entame sont approfondis à travers des articles dédiés au Capitaine Futur (“Capitaine Futur : ad astra !” de Philippe Boulier) et à la carrière de l’auteur dans le comics (“Le sense of wonder avec une cape : Edmond Hamilton, scénariste de bande dessinée” de Laurent Queyssi). Les deux rédacteurs ne se contentent pas d’effleurer le sujet, ils le cernent à chaque fois avec justesse en s’attardant notamment sur le contexte, enrichissant d’autant la perception de l’écrivain et de la SF de l’époque. “Un guide de lectures hamiltonien” aborde les ouvrages disponibles en français et révèle une grosse différence entre l’importante bibliographie concoctée par Alain Sprauel (quelle minutie !) et les écrits à notre disposition. Cela ne peut laisser que rêveurs les fans...
C’est aussi fort à propos qu’a été traduite l’introduction signée Leigh Brackett, la femme de l’auteur, pour « The Best of Edmond Hamilton », ouvrage paru en 1977 quelques mois après la mort de l’écrivain. “Cinquante ans d’émerveillement” s’avère touchant, car Leigh Brackett y livre toute l’admiration qu’elle avait pour son mari, jetant un œil lucide sur sa production et son apport au milieu.
Cette partie rédactionnelle appréhende très bien qui était Edmond Hamilton et sa carrière s’étendant sur une cinquante d’années. Elle offre aussi un panorama très intéressant sur l’âge d’or de la SF aux États-Unis.

L’équipe éditoriale avait l’embarras du choix quant aux nouvelles inédites.
“Le berceau de la création” (1951) constitue la dernière aventure du Capitaine Futur. Elle met en scène un Curt Newton désabusé qui en vient à douter de la nature humaine. L’ambition de l’homme le pousse à s’ériger en dieu et même lui est proche d’y sombrer. Le lecteur des premiers titres traduits ne pourra manquer de remarquer la différence entre ceux-ci et le présent texte plus mûr, plus sombre par son sujet et son approche. L’article de Philippe Boulier insiste d’ailleurs sur l’évolution du personnage et de ses récits.

“Comment c’est là-haut ?” date de 1952 mais la première mouture remonte aux environs de 1932, comme l’explique Leigh Brackett dans sa préface. Un homme revient de la seconde exploration martienne. Tout le monde lui pose la même question et il adapte sa réponse à chaque fois, n’osant avouer la vérité. Le retour chez lui est ponctué d’étapes chez les familles de collègues morts, constituant autant d’épreuves douloureuses, car le replongeant dans ses souvenirs.
Racontée de manière détournée, l’histoire principale offre un regard sans complaisance sur le prix à payer pour la conquête spatiale. L’homme est bien peu de chose face à l’immensité du vide. Comment peut-il l’appréhender quand sa vie est dans la balance ?
Ces deux textes illustrent très bien un pan relativement méconnu d’Edmond Hamilton en France, ses nouvelles qui font mouche.

Dernière fiction au sommaire : “Les torches” de Michael Rheyss qui ne manque pas d’à propos. Sur un ton plein d’humour est présenté un voyage cherchant à démontrer que la SF en Amérique a été inspirée par la SF russe. Hugo Gernsback est bien sûr invoqué et l’ensemble se révèle aussi instructif que distrayant.

Une quarantaine de pages de chroniques, l’interview de l’illustrateur Melchior Ascaride et des informations diverses concluent ce numéro.
Sans oublier “Scientifiction”, revenant ce trimestre sur “The thing, la chose d’un autre monde” décortiqué par J.-Sébastien Steyer, Roland Lehoucq et François Moutou (un nouvel intervenant).

La couverture de Philippe Gady dans l’esprit Pulp et l’intitulé « Edmond Hamilton : le roi des étoiles » donnent la tonalité de l’ensemble. Ce numéro montre tout ce que la science-fiction doit à Edmond Hamilton. Il écrivait beaucoup et profitait de toutes les opportunités ; c’était une obligation, car il vivait de sa plume. Toutefois, il faisait preuve d’exigence, cherchant sans cesse à progresser mais sans brider son imagination portée vers les grands espaces. Il savait comme nul autre communiquer ce sense of wonder si difficile à cerner.
Également reflet de l’époque des pulps, ce « Bifrost » s’avère un must !


Titre : Bifrost
Numéro : 90
Rédacteur en chef : Olivier Girard
Couverture : Philippe Gady
Type : revue
Genres : SF, études, critiques, nouvelles, entretien, etc.
Sites Internet : le numéro 90, la revue (Bifrost) et l’éditeur (Le Bélial’)
Dépôt légal : avril 2018
ISBN : 9782913039872
Dimensions (en cm) : 14,9 x 21
Pages : 192
Prix : 11€


Edmond Hamilton sur la Yozone :
Capitaine Futur
(T1) L’empereur de l’espace
(T2) À la rescousse
(T3) Le défi

Pour contacter l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
24 mai 2018


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