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Galaxies n°44 (Nouvelle Série)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Revue, n°44, SF - nouvelles - articles - entretien - critiques, novembre 2016, 192 pages, 11€

Après lecture de ce numéro de « Galaxies » / « Mercury », trois choses me restent vraiment à l’esprit : le dossier Orson Scott Card et les nouvelle de Jean-Luc Marcastel et de Nina Allan pour son atmosphère. Hors l’importante partie consacrée au cinéma, le reste n’a pas plus imprimé ma mémoire que cela.
Pourtant la magnifique illustration de couverture signée Vael Cat annonçaient le meilleur !



Pierre-Alexandre Sicart est un grand connaisseur d’Orson Scott Card. En charge du dossier, il en a assuré l’intégralité, y compris les traductions de la nouvelle “Vieux enfants” et de sa présentation. Il commence par un décryptage de l’œuvre de l’écrivain et j’ai trouvé bizarre qu’il demande l’aval de Card pour la publication. Il a son ressenti, son analyse des bouquins de Card, qui n’a peut-être pas les mêmes, alors pourquoi chercher une légitimité auprès de lui pour cet article ? Il poursuit par une biographie tout aussi instructive et intéressante que ce qui précédait.
Puis arrive l’entretien avec Card. Je le connaissais mormon, je n’ai donc pas été surpris, d’autant que cela ressort d’« Alvin le Faiseur ». J’ai trouvé que son rapport à l’argent revenait souvent et la faiblesse de certaines suites prouve qu’il n’hésite pas à produire pour vivre, même si l’intérêt doit en pâtir. En tout cas, il m’a perdu par le passé à cause de ce constat et j’ai abandonné toute curiosité sur sa production. J’avoue d’ailleurs avoir été pour le moins surpris quand j’ai vu l’importance de sa bibliographie en français.
“Vieux enfants” a été écrit pour le troisième volet des « Dangereuses visions » d’Harlan Ellison qui n’a jamais vu le jour. Il traite de sénilité précoce. À 20 ans passés, on est déjà vieux et sur le déclin jusqu’à retomber en enfance. Alors il y a une course à trouver le remède mais sans succès. C’est assez plat, ne m’a pas semblé beaucoup étayé scientifiquement, donc plutôt pauvre dans l’ensemble. À considérer surtout comme une curiosité.
Après lecture de ce dossier, est-ce que j’ai retrouvé l’envie de lire du Card ? Pas vraiment, si ce n’est celle de relire ses ouvrages des débuts.

Parmi les nouvelles ressort “Bestialité” de Jean-Luc Marcastel. C’est la plus longue, mais celle qui se lit le plus vite, car elle s’avère très accrocheuse. La Terre a perdu de sa superbe, des aliens la dominent et les humains survivent misérablement sous leur coupe. Contre toute attente, Skaïr de la classe des nobles s’éprend de Fania, une jeune fille. Au fil des ans, une belle complicité naît entre eux jusqu’à ce qu’il se noue une relation dangereuse car réprouvée par les envahisseurs. Son rang ne le protège pas du déshonneur et le voilà obligé de se battre pour ce droit à aimer, même s’il ignore ce terme, une étrangère.
Entre combats et flash-back, le récit oscille entre fureur et sentiment. L’ensemble s’avère passionnant et bien ficelé pour conserver l’intérêt jusqu’au bout. Intelligemment, Jean-Luc Marcastel livre une conclusion à double sens. Happy-end ou non ? Chacun la vivra à sa façon. Beau texte plein d’humanité.

Claudio Chillemi nous fait partager la vie d’un fonctionnaire nostalgique du passé, de l’époque du Duce. Par un tour de passe-passe, il voyage à travers le temps, mais ne comprend jamais ce qui lui arrive, même lors d’une rafle, alors qu’il semble apprécier ces jours disparus.
J’ignore quel était le but de l’auteur (dénoncer les horreurs de l’époque ? Alerter sur l’attrait de certains électeurs pour les partis fascistes ?), mais “Par les yeux de l’ennemi” dégage une atmosphère nauséabonde et ne mérite pas de s’y attarder.

Dans “L’échelle de Dieu”, Brice Travel lance son personnage à l’assaut d’un arbre géant, c’est-à-dire dépassant largement le sommet de l’Everest. Aidé en cela par un exosquelette, il découvre l’origine de cette anomalie de la nature. L’ensemble n’est pas sans rappeler l’idée de « Jack et le haricot magique », mais il transpose le cadre merveilleux à la science-fiction. La montée physique s’accompagne de révélations inattendues. Étonnamment il m’a fallu relire le récit en diagonale pour en parler, alors que c’est plutôt bien pensé et surprenant.

Nina Allan a écrit une nouvelle à l’atmosphère pesante et fascinante. Deux garçons et deux filles, même si le constat n’est pas immédiat, cherchent un lieu où être tranquilles. Un ancien hôtel semble tout indiqué. Le chemin pour s’y rendre, le trou dans la clôture par où passer, la fenêtre entrouverte à franchir pour y pénétrer... apparaissent comme autant de passages vers l’inconnu. À quoi assiste vraiment le lecteur ? À un glissement subtil du temps ? Mais quel est le point de départ et celui d’arrivée ? “Le vicaire aux sept pignons” interpelle par les questions soulevées. Pas de grands effets, mais un rythme lent, poisseux. Objectivement c’est très bon, mais il faut aimer ce style d’histoire.

“Voie d’amour” peut se rapprocher de “Vieux enfants”, nouvelle dont elle prend le contre-pied. Il est d’ailleurs indiqué en hommage à l’énergie philotique d’Orson Scott Card, rien de moins ! C’est court, mais lourd et guère entraînant. Aussi vite lue, aussi vite oubliée !

“Service des affaires classées” ne remet pas en lumière un ancien texte, ce qui me semblait la vocation de cette rubrique, mais un auteur. En l’occurrence, il s’agit de Paul Hanost qui écrit toujours. “La panthère noire” se révèle pour le moins mystérieuse. De quoi s’agit-il vraiment avec ce Dieu tout puissant observant Sa création ? Il est clair que Paul Hanost cherche à faire passer un message, utilisant le biais de la fiction pour le transmettre. Une lecture me semblant à plusieurs étages, encore faut-il accepter d’en faire l’effort !

Jean-Luc Marcastel ressort grand gagnant de ce numéro. “Bestialité” ne révolutionne pas le genre mais s’avère d’une redoutable efficacité, ce qui manque à beaucoup dans le présent numéro. Plus subtile, la prose de Nina Allan demande une plus grande attention pour en saisir la richesse et nous envoyer dans un ailleurs légèrement décalé.
Seul aux commandes du dossier Orson Scott Card, Pierre-Alexandre Sicart a exécuté un bon travail, mais l’écrivain ne convainc pas forcément par son discours.


Titre : Galaxies Nouvelle Série
Numéro : 44 (86 dans l’ancienne numérotation)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Couverture : Vael Cat
Type : revue
Genres : SF, études, critiques, entretiens...
Site Internet : Galaxies
Dépôt légal : novembre 2016
ISSN : 1270-2382
Dimensions (en cm) : 13,8 x 20,9
Pages : 192
Prix : 11€



Pour écrire à l’auteur de cet article :
[email protected]


François Schnebelen
11 février 2017


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