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Sombres Tombeaux
Collectif
Editions du 38, Collection du Fou, recueil (France), fantastique-horreur, 200 pages, septembre 2016, 16,90€

Halloween, Samain... Ou le jour des morts. Il y a dans cette période de fin octobre à début novembre un moment hors temps, commun aux cultures celtes, une période floue où les mondes des vivants et des morts sont poreux.



« Sombres Tombeaux » a le grand mérite de ne pas tomber dans les travers du thème, offrant un large éventail d’histoires souvent effrayantes, où la Mort et les morts sont très présents, pour mieux mettre en lumière l’attitude des vivants. C’est autour de la forme du tombeau que s’articule cette anthologie : lieu de repos, dernière et éternelle apparence du défunt, lieu de recueillement, et prison en même temps. Surtout pour qui y pénètre sans invitation.

L’entame donne immédiatement ce ton à contre-courant. “Une peau blanche comme la lune et des yeux bleus comme des étoiles” nous place du côté des morts, qui « vivent » tranquillement dans leur cimetière. Jusqu’à ce que les vivants, qui les pleurent, parviennent à traverser le voile et les retrouver. Et là, passée la joie des retrouvailles, rien ne va plus. Un texte très beau, qui parle du travail nécessaire de deuil avec douceur. Sans doute le plus atypique et le plus mémorable de ce recueil. Félicitations à NokomisM.

En guise de contrecoup, “La Vigne” de Sylvain Lamur nous plonge dans de l’horreur pure, avec de sanglantes vendanges narrées à la première personne. Cela réveille.

Le Gisant” de Vincent Gaufreteau s’intéresse au gisant de Victor Noir, au Père-Lachaise, dont la bosse du niveau de l’entrejambe est célèbre et sujette à autant de fantasmes que de textes (Patrice Dupuis l’évoquait dernièrement). Mais l’auteur en tire une histoire fantastique dans un univers de merveilleux steampunk, un vrai rafraichissement.

Dans “La Baie des trépassés”, Jean-Pascal Martin alterne les points de vue entre un auteur en herbe venu s’enterrer sur une côte bretonne et la tenancière du café du coin. A côté de la baraque sur la côte, il y a un appentis nauséabond qui finit par obnubiler le personnage. L’atmosphère déjà bien poisseuse dès les premières lignes fond lentement mais sûrement vers l’horreur teintée de légendes, à vous dégoûter de la Bretagne.

Paul Clément s’en prend aux enfants dans “Talis”, avec des pré-ados qui, découvrant un bunker et les restes d’un soldat, pillent le squelette en guise de trophée. La vengeance du défunt sera terrible.

On reste dans le dérangeant avec le “Métal Souffrant” de Marie Tétart. Le jeune adulte au centre de son histoire a d’étranges et douloureuses visions, d’enfants abusés et marqués dans leur chair. Des visions qui le poussent à aller déterrer une vérité enfouie à double titre. Très psychologique, le texte transpire la souffrance de ses personnages.

Détour par la fantasy pour le “Fléau des Mal’bêtes” d’Eleyna G.. Un chasseur de monstres, diminué par une blessure, se lance dans l’exploration d’un prédécesseur mythique, accompagné d’un aventurier qui incarne tout ce qui le répugne dans sa relation contrainte à la magie et aux monstres. Lui se croit le garant d’une pureté, le blanc chevalier, il n’est qu’un intolérant aveugle au monde qui l’entoure... et va le lui faire payer.

On conclut avec une nouvelle aventure spatiale de la capitaine Akatz de Bénédicte Taffin. Dans “Les Oubliées”, la femme-chat et son adjoint Isidore traque des fugitifs au cœur d’un mausolée, dans un astéroïde évidé. Et les âmes qui reposent dans l’espace sont loin d’être en paix. Une intéressante réflexion sur le droit de mourir, le droit à l’oubli, au deuil et l’euthanasie.

Si l’horreur et la violence physique sont certes présentes, on constate donc que les auteurs ont également su s’en démarquer, et offrir une large réflexion autour de ses tombeaux, prenant en compte les sentiments des défunts, l’usage que les vivants peuvent en faire, le droit de couper le cordon. De beaux textes, et qui forment ensemble un recueil cohérent, qui ne se contente pas d’instiller le malaise, mais pousse à s’interroger sur notre rapport aux disparus, proches ou inconnus.


Titre : Sombres Tombeaux
Auteurs :
- NokomisM, “Une peau blanche comme la lune et des yeux bleus comme des étoiles”
- Sylvain Lamur “La Vigne”
- Vincent Gaufreteau “Le Gisant”
- Jean-Pascal Martin “La Baie des trépassés”
- Paul Clément “Talis”
- Marie Tétart “Métal Souffrant”
- Eleyna G. “Fléau des Malbêtes”
- Benedict Taffin “Les Oubliées”
Couverture : Anne-Eleonor Olivier
Éditeur : Éditions du 38
Collection : Collection du Fou
Site Internet : page roman (site éditeur)
version papier :
Pages : 214
Format (en cm) : 20 x 13 x 1
Dépôt légal : septembre 2016
ISBN :
Prix : 16,90 €
version numérique :
Pages : 167
Prix : 6,99 €



Nicolas Soffray
9 décembre 2016


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