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Satan était un ange
Karine Giébel
Fleuve Noir, Thriller Policier, roman (France), polar/noir, 336 pages, novembre 2014, 18,90€

La découverte de sa tumeur au cerveau pousse François à fuir. Cet avocat d’affaires prend la voiture et trace la route, comme s’il espérait semer ce mal qui le ronge et ne lui laisse que quelques mois à vivre.
Lui qui n’a toujours pensé qu’à sa carrière s’arrête pour embarquer un auto-stoppeur. Pourquoi ? Il se le demande lui-même. Le jeune homme dont il pourrait être le père se nomme Paul, il ne quitte jamais son sac à dos et François trouve sa compagnie agréable.
Les deux vont faire un bout de chemin ensemble... pour le meilleur et le pire.



Karine Giébel est une auteure de polar multi-primée. « Satan était un ange » est son huitième roman. Au vu de l’importante liste de prix remportés, on peut en attendre le meilleur. Pourtant, il n’est pas exempt de reproches.
Dater cette histoire en 2000 relève de la bizarrerie, surtout que c’est maladroit, car les sommes évoquées sont en francs. Quand on nous parle de 200 plaques, même pour ceux qui ont connu cette période, c’est loin d’être évident de se faire une idée du montant exact.
Il fait aussi fait référence à la journaliste Ilaria Alpi assassinée avec son cameraman en Somalie. Les faits se sont déroulés en 1994, alors il aurait été compréhensible de dater le récit la même année.
Pourquoi 2000 ? Mystère... On pourrait penser que le succès arrivant, ce roman est sorti de son tiroir plus d’une décennie après son écriture, sans recevoir le dépoussiérage qu’il méritait. Et il ne fallait pas grand-chose pour le remettre au goût du jour !

Après, il faut tout de même une bonne dose de suspension d’incrédulité pour accepter cette rencontre entre François et Paul qui n’ont rien en commun. François n’a toujours pensé qu’à sa personne, à son boulot. Qu’il quitte tout du jour au lendemain, qu’il ne se batte pas contre la maladie, même si elle est incurable a de quoi surprendre. D’autant qu’il abandonne sa femme sans la prévenir de quoi que ce soit. Il saute dans la voiture, descend vers le sud de la France pour il ne sait quelle destination. Et connaissant le bonhomme, il est étonnant qu’il s’arrête pour prendre un auto-stoppeur. Le début m’a gêné, car il ne m’apparaît pas plausible.
Le postulat de base semble bancal, mais accepter la relation qui naît entre les deux hommes revient à pénétrer dans une histoire forte qui ne cesse, au fil des révélations de Paul, de monter en puissance.

Tout l’intérêt de « Satan était un ange » tient justement dans cette rencontre qui se transforme vite en course-poursuite. Qui est Paul, ce jeune auto-stoppeur de 20 ans ? François va l’apprendre au fur et à mesure des événements. La vérité n’est pas toujours bonne à dire, mais traduit le sentiment de confiance éprouvé par Paul envers François.
Les relations entre les deux connaissent des hauts et des bas, surtout du côté de François lorsqu’il découvre les différentes facettes de Paul. Ce jeune homme de 20 ans a un lourd passé qui l’a façonné et il est difficile d’aller contre, mais il essaie. François est là pour l’aider, même si cela ne doit durer qu’un temps.
François a coupé les ponts avec son ancienne vie, il a trouvé une nouvelle motivation pour continuer jusqu’au bout, jusqu’à l’inéluctabilité de sa mort. À l’image de François, malgré ce que l’on apprend sur le compte de Paul, on ne peut se départir d’un sentiment de sympathie, toutefois retenu, pour Paul. Ne mérite-t-il pas une existence normale, loin du milieu dans lequel il a vécu son adolescence ? Celle-ci n’a pas été tendre avec lui, alors il tente de sortir de tout ça.
Ce pan de « Satan était un ange » est haletant, il alimente la curiosité malsaine des lecteurs, leur en donne pour leur argent. C’est dur, poignant comme un être humain peut aussi devenir une marchandise. Nous sommes plongés tête première dans un milieu fermé sur lui-même, dans une bulle avec sa propre justice, comme va l’apprendre François.
L’ensemble est très bien amené, ne nous est pas jeté brutalement à la figure, ce qui aurait provoqué une overdose. Là, on monte dans l’horreur, ce qui est très habile et montre le métier de Karine Giébel qui parvient à nous immerger dans son récit, alors que le début pouvait nous en éjecter.

« Satan était un ange » nous conduit sur une route parsemée de morts et de fantômes, en compagnie de deux hommes que tout séparait, mais qui vont se lier d’amitié envers et contre tout. Malgré quelques maladresses, le récit happe le lecteur, pris à bord d’un roman sans concessions et fort en révélations.
On attendra avec curiosité le prochain roman de Karine Giébel, une auteure française, qui sait nous plonger dans la noirceur humaine.


Titre : Satan était un ange
Auteur : Karine Giébel
Couverture : © Axel Mahé
Éditeur : Fleuve Noir
Collection : Thriller Policier
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 336
Format (en cm) : 14 x 22,5
Dépôt légal : avril 2014
ISBN : 978-2-265-09839-8
Prix : 18,90 €



Karine Giébel sur la Yozone :
- « Les morsures de l’ombre »
- « Le purgatoire des innocents »


François Schnebelen
10 décembre 2014


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