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Amiral (L’)
Blaise Cendrars
Folio, Folio 2€, n°5795, roman (France), littérature générale, 95 pages, mai 2014, 2€

Dans les années trente, Blaise Cendrars publie trois recueils de nouvelles, « D’Oultremer à Indigo », « Histoires vraies », et « La Vie dangereuse ». Celles-ci sont inspirées par ses aventures, ses voyages, ses traversées maritimes entre l’Europe et le Brésil, où il séjourne à plusieurs reprises. C’est tout particulièrement le cas pour « L’Amiral », qui se passe presque entièrement à bord d’un transatlantique.



Histoire vraie, histoire inventée, histoire fantasmée ? Sans doute en va-t-il un peu des trois, dans cette longue nouvelle où Cendrars se pose lui-même en narrateur et décrit sa rencontre avec le capitaine Jensen, sur le transatlantique Eric-Juel qui assure les traversés entre le Nouveau-Monde et la vieille Europe. Tout commence, comme il se doit, avec une pointe d’exotisme à Pernambouc, et se poursuit dans ces atmosphères feutrées, amicales, et parfois un peu guindées, qui sont celles des voyages d’élite, d’affaires, où l’on est obligé, même lorsque l’on n’en a pas trop envie, de dîner à la table du commandant.

Cendrars, qui n’a pas un goût excessif pour les mondanités, préférerait rester à l’écart mais ne parvient pas à se soustraire à ces mondanités. Une corvée, mais aussi une chance : car une solide amitié se noue entre lui et le commandant Jensen, amitié qui, peu à peu, ouvre les portes sur un mystère qui de plus en plus tiraille l’écrivain. À plusieurs reprises, Cendrars sent que le marin est sur le point de se confier à lui. Quel est donc le secret du commandant Jensen ? Une histoire de femme, sans doute.

Une histoire de femme, oui, car « L’Amiral » est dans son essence une histoire d’amour, un amour sans cesse pris au piège de la réalité. En quelques pages, tout y est : le coup de foudre instantané, l’amour contrarié, impossible, le drame abominable, les choix infaisables, et pour finir le lent déclin des affects, les frustrations, l’inexorable usure des affects et des sentiments.

Avec bonheur, Blaise Cendrars enrichit son récit d’anecdotes qui n’ont pas grand-chose à voir avec sa trame mais viennent lui donner sa pleine saveur sans jamais briser sa cohérence, lui apportent cet arrière-fond qui fait vrai, qui sent le vécu, qui respire l’amour de la vie, de la fantaisie, des rencontres. Ainsi, le lecteur n’est pas près d’oublier le destin de ce bouc qui, jeté vivant aux requins, l’emporte sur les squales, le très beau tableau de ce lamantin humanoïde auquel Cendrars vient offrir, en guise de pitance, des coûteux bouquets de roses, ou le délirant cabinet de curiosités d’un cordonnier venu s’installer dans une ville où tout le monde marche pieds nus.

Si « L’Amiral » n’est qu’une longue nouvelle d’environ quatre-vingt-dix pages, elle apparaît représentative du talent de l’auteur, de sa faconde, de son sens de l’observation, de sa manière de brosser les personnages, de sa curiosité, de son goût pour la découverte. Une bonne manière, sans doute d’entrer dans l’œuvre de l’auteur. Mais il serait dommage de s’arrêter en si bon chemin : le lecteur désireux de goûter cette nouvelle en compagnie d’autres récits pourra la trouver dans le recueil « D’oultremer à indigo », également paru chez Folio.


Titre : L’Amiral
Auteur : Blaise Cendrars
Couverture : Larryrains / Getty Images
Éditeur : Folio (édition originale : Denoël,1960)
Collection : Folio 2 euros
Site Internet : page roman (site éditeur)
Numéro : 5795
Pages : 95
Format (en cm) : 11 x 18
Dépôt légal : mai 2014
ISBN : 9782070457175
Prix : 2 €



Hilaire Alrune
21 juin 2014


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