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Encre et le Sang (L’)
Franck Thilliez, Laurent Scalese
Pocket, roman (France), thriller / fantastique, 117 pages, juin 2013, 2,90€

William Sagnier s’est fait rouler dans les grandes largeurs. Son roman qui fait un tabac au niveau planétaire lui a été tout simplement volé par son éditrice, laquelle l’a fait publier sous le nom d’un de ses amants en compagnie duquel elle ramasse gloire et fortune. Alors que tous deux sont à Hong Kong, fermement décidés à conquérir le marché asiatique du livre, Sagnier, qui a tout perdu et n’a plus qu’une poignée de dollars en poche, débarque pour se venger, quoi qu’il puisse lui en coûter. Une paire de dobermans et d’agents de sécurité plus tard, il oscille au bord du suicide. Dans une boutique en plein air, une vieille machine à écrire l’attire : lourde d’une bonne dizaine de kilos, elle va boucler la boucle et sceller son destin. Un bon poids, avec un morceau de corde, pour en finir dans le port de Hong-Kong.



Mais lorsqu’il s’amuse à taper quelques lignes ultimes, il réalise que tout ce qu’il peut écrire à l’aide de cette machine advient dans le monde réel.

Si la puissance de cette machine a quelque chose de biblique – «  Au commencement était le Verbe » – elle renvoie aussi à une très longue tradition d’allégories fantastiques : en conférant un pouvoir inhabituel, l’objet magique engage son propriétaire dans une série de tentations qui révèleront soit sa grandeur d’esprit, soit la noirceur de son âme. Catalyseur et révélateur, l’objet devient pour le meilleur et pour le pire, l’artisan d’un destin. On n’en finirait pas de citer les exemples ; notons seulement l’un des plus connus, chez Tolkien, l’anneau qui fait de Gollum ce qu’il est, et se révèle bien proche de faire basculer Frodon dans l’obscur.

Une machine puissante qui est aussi une arme : on devine la suite, et les tentations qui assaillent l’écrivain spolié de son œuvre. Un auteur de thrillers horrifiques avec meurtres sadiques : la tentation d’utiliser son imagination morbide au service d’une revanche exemplaire est immense.

Franck Thilliez et Laurent Scalese auraient pu se contenter de faire de cette novella un récit très linéaire. Avec astuce, ils rebattent les cartes avec l’arrivée d’un tiers bien mystérieux, la fatalité et les dégradations – qui ne sont pas seulement celles de l’âme – auxquelles cette machine expose, et composent in fine une histoire mêlant harmonieusement fantastique et thriller.

Il est tout de même singulier qu’en se mettant à deux – deux auteurs de romans policiers qui en tant que tels devraient tout de même prêter attention aux détails – nos auteurs permettent à ce qu’avec une machine à écrire dépourvue de lettre « G » William Sagnier (et ceci même si la machine est elle-même mise en abîme, ce qui ne le permet pas plus) écrive de nombreux messages comportant cette lettre et pire encore crée un personnage (dont le moins que l’on puisse dire est qu’il n’est pas précisément secondaire) se nommant « Cheng ». Une négligence de taille qui en apportant une touche d’humour, hélas involontaire, vient dédramatiser une fin qui malgré tout reste astucieuse et fait de « L’Encre et le sang » une honorable novella fantastique combinée à une fable morale.


Titre : L’Encre et le Sang
Auteurs : Franck Thilliez, Laurent Scalese
Couverture : All Canada photos RM / Getty Images / Fancy Premium Masterfile
Éditeur : Pocket
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 117
Format (en cm) : 11 x 17,5
Dépôt légal : juin 2013
ISBN : 9782266208567
Prix : 2,90 €


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Hilaire Alrune
5 août 2015


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