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Dark Secrets
Michael Hjorth & Hans Rosenfeldt
Prisma, roman traduit du suédois (Suède), policier, 454 pages, novembre 2013, 20,95€

A Vasteras, , loin de Stockholm, est découvert un crime affreux : un ado tué de nombreux coups de couteau, le cœur arraché. Après des débuts laborieux, la police locale fait appel à la brigade criminelle qui débarque et prend la direction de cette étrange et horrible affaire.
Ancien psy de la Crim, Sebastian Bergman est à Vasteras pour vendre la maison familiale suite au décès de sa mère. Lui qui avait coupé les ponts avec père et mère ne fait pas de sentiments. Sa vie est de toute façon brisée depuis le tsunami asiatique, qui lui a pris sa femme et sa fille. Addict au sexe, il enchaîne les conquêtes d’une nuit, chassant tout ce qui passe à la recherche de quelques instants d’oubli...
Mais voilà que l’ado de la maison voisine est suspecté par la police, et Sebastian recroise Torkel, son ancien chef, qui lui propose de rejoindre l’enquête. Au-delà de se remettre en selle, Sebastian voit là une occasion de consulter les fichiers de la crim’ : dans les papiers de sa mère, il a retrouvé une lettre, vieille de 30 ans, d’une de ses femmes d’un soir qui dit être enceinte de lui. Une seconde chance ?



Thriller évènement, best-seller, découvert et publié en Suède par l’éditeur de Stiegg Larssen (« Millenium »), « Dark Secrets » est, pour le néophyte en polar suédois que je suis (et qui n’a même pas lu « Millenium », juste vu le film, c’est vous dire), terriblement banal, à quelques bonnes idées près. Apprendre que Michael Hjorth et Hans Rosenfeldt sont scénaristes pour la télévision ne surprend donc guère, tant leur texte suit cette mode d’ultra-réalisme d’une enquête de terrain.

Les choses commencent mal, à cause de lenteurs administratives et d’un flic local un peu aigri qu’une femme ait été promue à sa place. Ce malheureux, plein de bonne volonté pourtant, va être le boulet de l’histoire : chaque initiative qui pourrait redorer son blason va lamentablement échouer. Enfin bref, l’enquête piétine, la Crim’ arrive, ce sont des pros, etc. Déjà là, si vous regardez un tant soit peu une série américaine du genre « Esprits Criminels » (« Criminal Minds »), vous êtes en terrain familier, remplacez juste Crim’ par FBI.
Je ne vous gâche pas tout, sachez seulement qu’à cause des retards de l’enquête, rien n’est facile, ça piétine, la presse s’en mêle, la mère de la victime n’est pas coopérative, et comme le sous-entend le titre, beaucoup de gens ont des sombres secrets à Vasteras. Pour Sebastian, ce sera l’occasion de détruire l’œuvre de son père, en ruinant la réputation du lycée huppé où Roger, la victime, était scolarisé.
Comme souvent, la police croit avancer, mais ici avec ses maigres indices et la pression médiatique, ils foncent tête baissée sur la moindre piste, et font fausse route les 3/4 du bouquin. Mais les auteurs entretiennent savamment l’illusion avec un bon procédé : quelques chapitres donnent la parole (enfin le point de vue) de « l’homme qui n’était pas un assassin ». Si immédiatement on se fait à l’idée que c’est un tordu qui ne considère pas son crime comme tel, la fin lèvera le voile sur la vérité, qui était « sous nous yeux » ou presque.

Bref, par un coup du sort, et un peu d’élimination naturelle (la morgue se remplit plutôt bien à Vasteras), la vérité éclate dans les derniers chapitres. Et on se dit que la Crim’ aura fait coup double : trouver la vérité et fait un peu de ménage dans ce bled. Mais bon, on se dit que si les flics collectaient mieux les preuves plutôt que foncer tête baissée, ils seraient rentrés plus tôt à Stockholm.

Le temps est un premier problème dans ce roman. Je suis incapable de vous dire combien de temps dure cette enquête. Les multiples points de vue allongent certes les journées, mais le nombre de fois où l’un ou l’autre renvoie une tâche ou une visite au lendemain pour X raison est assez fréquent, et on a parfois l’impression que la chronologie s’embrouille. Des indicateurs temporels du genre le jour de la semaine ou la date disparaissent dès l’arrivée de la crim’, ne restent que les nuits pour cadencer le tout, mais certains semblent se coucher plus souvent que d’autres, ou pas en même temps. Certes, c’est un détail, mais parfois on a du mal à ne faire confiance qu’à la continuité des chapitres pour établir la succession ou la simultanéité des évènements.

La « maladie » de Sebastian est amusante un moment, mais comme il se décide de se tenir à carreau pour ne pas mettre Torkel en difficulté, ça ne dure qu’un temps. De toute façon, il avait déjà couché avec toutes les femmes de Vasteras mêlées à l’enquête. Et ses collègues féminines, comme toute l’équipe, le détestent cordialement.

On terminera par le dernier ratage : le roman se clôt sur la révélation de l’identité de la fille de Sebastian. Et quel plus gros cliché qu’un autre personnage de cette histoire, qui de préférence déteste Sebastian mais va sûrement devoir travailler avec lui ? Du malaise à sens unique en prévision pour les deux prochains tomes de cette trilogie...

Bref, si « Dark Secrets » a tous les ingrédients actuels du genre (violence du crime, secrets de chacun, fausses pistes, une petite dose de vie privée des enquêteurs), il en a aussi le principal défaut : la banalité, à force de respecter à la lettre tous les codes, et il étale sur 450 pages (soit 7 à 8 heures de lecture) ce qu’une série américaine nous déroule en 45 minutes, 90 maxi.
Ça tombe bien, le roman a justement été adapté en série télé dès 2010, en 2 épisodes d’1h30. Quelle surprise...
Oserai-je la comparaison avec l’excellent « Wallander » campé par Kenneth Branagh ? Il faudra voir, et juger...
Et attendre les deux autres volumes en attente de traduction : été 2014 pour le second...


Titre : Dark Secrets (Det Fordolda, (littéralement « Le Maudit »), 2010)
Série : Sebastian Bergman, 1/3
Auteurs : Michael Hjorth & Hans Rosenfeldt
Traduction du suédois (Suède) : Max Stadler
Couverture : Thinkstock / Par Winkholm
Éditeur : Prisma
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 454
Format (en cm) : 24 x 14,2 x 3,5
Dépôt légal : novembre 2013
ISBN : 9782810404643
Prix : 20,95 €



Nicolas Soffray
16 décembre 2013


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