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Galaxies n°21 (Nouvelle Série)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Revue, n°21, SF - nouvelles - articles - critiques, janvier 2013, 192 pages, 11€

Publié pour la première fois en 1963 dans les pages de Fiction, Daniel Walther fête cette année ses cinquante ans d’écriture. Un événement qui ne pouvait rester dans le silence et que « Galaxies » s’est proposé de partager avec ses lecteurs.
À cette occasion, la formule du dossier change, car il n’y a pas d’entretien avec l’intéressé. Richard Comballot a écrit un long article sur Daniel Walther, se basant sur les propos recueillis dans plus d’une quinzaine d’interviews accordés au long de sa carrière. On ne peut que saluer cet important travail de compilation qui se lit d’une traite et retrace la vie de l’écrivain de très belle manière. Un article qui assurément fera date.



En plus d’un questionnaire de Proust et d’une bibliographie de ses romans et recueils, la nouvelle très ballardienne “Grenades (de cristal) dégoupillées” nous est proposée. Une drôle de guerre, une femme qui obsède les hommes, un décor très cristallin : le mélange Daniel Walther - James Graham Ballard surprendra pour le meilleur. On est loin de la littérature sage et bien pensante, “Grenades (de cristal) dégoupillées” illustre à merveille l’obsession de l’écrivain pour les femmes et nous plonge finalement dans les pensées peu avouables que la majorité des hommes n’ose pas avouer. Et ce, toujours avec style !

Au sommaire, ce ne sont pas moins de six nouvelles qui côtoient ce nouveau petit bijou walthérien.
Cette fois-ci, Viktoriya et Patrice Lajoye ont traduit du russe “Épopée de carnassier” de Leonid Kaganov. Partager ses derniers instants à côté d’un être qui nous est étranger, ne raisonne pas comme nous et dont on voit surtout la fourrure n’est pas banal. Quand c’est réel et que la réserve d’oxygène s’avère insuffisante pour sauver le cosmonaute et Glaya, une duveteuse, un choix cornélien se pose...
Non dénué de philosophie, l’échange entre les deux survivants d’une catastrophe spatiale donne une belle leçon d’humanité. Décidément, ces traductions en provenance de l’Est risquent d’être attendues à l’avenir !

Jean-Noël Lafargue surfe sur les nouvelles technologies. Il imagine une dérive possible du système : pouvoir parler à un disparu comme si de rien n’était au moyen d’un smartphone est devenu une réalité. Bien sûr, ce service proposé par l’opérateur est payant. L’expérience est pour le moins déstabilisante.
La sœur de poche” pose un cas de conscience et touche forcément une corde sensible au fond de chacun de nous.

Simulacre” de Ken Liu n’est pas sans points communs. Il rajoute l’image à la simulation et permet à un père de vivre avec une ancienne version de sa fille, qui l’évite dorénavant, tournant en boucle à un âge où elle affichait encore une belle complicité avec son géniteur.
Inquiétante par ses implications, cette dérive, dévoilée à travers un drame humain, n’en prend que plus de force. Belle trouvaille venue des États-Unis.

Jean-Pierre Andrevon imagine l’irruption soudaine d’“Un ami fidèle”. Vous vous levez un matin et trouvez à vos côtés une espèce de missile qui vous suit partout. Tout le monde vous regarde d’un drôle d’œil, s’éloigne de vous, les proches évitent votre compagnie, on vous envoie en congé forcé pour alléger l’atmosphère de travail et fatalement vous vous repliez chez vous. Votre ancienne existence est révolue, mais quand le phénomène prend de l’ampleur, que d’autres rencontrent le même problème, vous entrez dans un nouveau cercle.
Concept de base plutôt rigolo, dont la logique est poussée jusqu’au bout. Il ne faut pas grand-chose pour que le regard d’autrui change. Bien vu, et avec les talents de conteur d’Andrevon, cela fait forcément mouche.

Tout dans le défunt mari de Mme Teodorescu est bon à recyclage. L’auteur roumain du même nom imagine-t-il ainsi sa fin ? Cristian-Mihail Teodorescu illustre de manière froide, impersonnelle et détachée comment la mort peut devenir un marché accepté par ceux qui restent. La veuve a tout prévu.
La mort de monsieur Teodorescu” fait froid dans le dos, mais n’est pas dépourvu d’un certain humour, forcément noir.

Le dernier trek” de Loïc le Borgne est emprunt de nostalgie. Un veuf, cette fois-ci, suit les traces d’un voyage qu’il a fait avec sa femme. Mais ce retour aux sources n’est pas à la hauteur, des détails le chagrinent.
À mon sens, ce récit manque de force, il est difficile d’adhérer à cette quête et, malgré la surprise réservée, il ne laisse pas grand souvenir.

À l’image de la partie Fictions, celle réservée au rédactionnel est aussi très fournie.
On notera avec intérêt l’intervention de Pierre Stolze qui possède sa propre rubrique dans « Bifrost ». Il revient fort à propos sur l’écrivain et soldat Driant, et complète par ses précisions l’excellent article que Philippe Ethuin lui avait consacré dans « Galaxies n°19 ».
D’ailleurs, “Le coin du bouquineur” s’attarde dans ce numéro sur « Aéropolis », roman de 1909 écrit par Henry Kistemaeckers. Toujours très intéressant et montrant la richesse de notre genre préféré.
Denis Labbé nous présente Jean d’Esme et son livre « Les Dieux Rouges » (1922) sur le thème des mondes perdus. Une autre loupe bienvenue sur notre passé.

Vous l’aurez compris, il s’agit là d’un très bon numéro de « Galaxies ». Le dossier sur Daniel Walther est entouré de nouvelles et d’articles souvent de haute volée. À ne pas manquer !


Titre : Galaxies Nouvelle Série
Numéro : 21 (63 dans l’ancienne numérotation)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Couverture : Caza
Type : revue
Genres : SF, études, critiques, entretiens, etc.
Site Internet : Galaxies
Dépôt légal : janvier 2013
ISSN : 1270-2382
Dimensions (en cm) : 13,8 x 20,9
Pages : 192
Prix : 11€



François Schnebelen
6 avril 2013


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