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Galaxies n°18 (Nouvelle Série)
Rédacteur en chef : Pierre Gévart
Revue, n°18, SF - nouvelles - articles - critiques, juillet 2012, 192 pages, 11€

Prévu à l’origine comme hors-série, ce spécial concours intègre la numérotation normale de la revue. Le thème de ce concours, organisé conjointement par « Galaxies » et le ministère de la Défense, portait sur le réchauffement climatique. Un sujet d’actualité dont on se rend compte des répercussions déjà aujourd’hui . Et en 2050 qu’en sera-t-il ?
Le jury composé de 5 membres, dont Virginie Raisson interviewée en préambule, a désigné les dix finalistes et le gagnant parmi les 59 textes reçus.



Une chose m’a d’emblée frappé. Deux textes finalistes ont déjà été publiés : “Monarque des glaces” de Michèle Laframboise qui a remporté le Prix Solaris en 2010 est paru dans « Solaris 175 » et “Soldats des bois, de la mer et du ciel” de Jean-Louis Trudel dans… « Galaxies Nouvelle Série n°3 ».
Difficile de parler d’anonymat dans ce cas-là. Ces deux nouvelles sont suffisamment marquantes pour qu’une fois lues, elles ne soient pas totalement oubliées. D’ailleurs, celle de Jean-Louis Trudel ne figure même pas dans ces pages. Comme quoi !

Nous avons donc affaire à neuf nouvelles dont certaines ne sont pas sans points communs. Il faut dire que ce qui vient immédiatement à l’esprit, ce sont la montée des températures, l’épuisement des ressources naturelles, l’économie en berne, les réfugiés climatiques…

Honneur à Gulzar Joby qui, avec “J’atteindrai le Pôle Nord”, a remporté le concours. En compagnie de Souad, une jeune Algérienne diplômée vendant des glaces, il nous invite à traverser une Europe bouleversée jusqu’au Pôle Nord. Ce carnet de voyage brosse un tableau noir de la situation de notre continent, il est agréable à suivre. Gulzar Joby allie la forme au fond. Prix pas immérité, même si d’autres textes m’ont fait plus forte impression.

Avec “Monarque des glaces”, Michèle Laframboise fait très fort. Le Prix Solaris 2010 est là pour en attester. Sous forme d’un papillon géant avec une tête humaine, observer du ciel les populations pour témoigner des changements peut sembler une noble mission. Mais l’humain qui survit ainsi ne peut accepter tout et n’importe quoi… Très bien écrite, cette belle histoire ne peut que toucher le lecteur. À défaut de la première place, le jury lui a donné un Prix spécial.

La révolte des enfants du soleil” de Julie Conseil oppose les gens normaux qui ne parviennent plus à supporter les effets dévastateurs du soleil et les modifiés que l’extérieur n’effraie pas. Ces derniers ont été génétiquement modifiés pour vivre le jour. Le soleil est un bienfait pour eux, alors que les autres vivent enterrés et ne sortent que la nuit. Forcément, cela excite les jalousies, d’autant que leur intelligence a suivi cette augmentation de leurs capacités. Julie Conseil a imaginé la confrontation entre deux espèces humaines, si proches et si éloignées à la fois. Elle revient sur le thème des mutations, contrôlées dans ce cas, mais dont le résultat est toujours le même : le conflit. C’est encore du tout bon !

Pour moi, Claude Ecken est un des plus grands nouvellistes français. Hélas, “Dernier convoi” m’a déçu, car à force de me prendre une bonne claque à chaque fois, la barre est placée si haut que ce texte ne la franchit pas. Pourtant, la matière est là ! Suite à une catastrophe sur une plateforme pétrolière, deux hommes conversent. Ils ne sont pas du même bord. Mal au point, le décideur et pollueur cherche à convaincre l’autre d’accepter une de ses villas. Il se justifie… mais de quoi vraiment ?
Les différents éléments ne s’assemblent que peu à peu, on ne comprend l’ampleur du désastre et la réelle situation des deux hommes qu’une fois le récit bien entamé. Claude Ecken dispose habilement les pièces de son puzzle, mais j’ai trouvé que l’ensemble a du mal à prendre, que ça n’avance pas assez vite. Une bonne nouvelle, mais dans la production de l’auteur, c’est moyen.

Noé Gaillard nous surprend avec “Thul, le dernier”. Ici, pas de technologie, mais un chaman peinant à guider sa tribu à travers la banquise. Leur civilisation est mise à mal par le progrès. Sujet déjà d’actualité mais qui n’en fait pas moins mouche et constitue une agréable surprise au sein des lauréats.

Raymond Iss nous convie à cueillir des oranges aux abords du château de Roquepiquet dans l’Agenais. De la main d’œuvre malienne est importée pour l’occasion. Comme pour le texte précédent, l’extrapolation à partir de notre société actuelle est bien mince. C’est ciselé, travaillé, mais “Oranges amères” m’a laissé froid, alors que “Thul, le dernier” m’a touché par son ton et la détresse qui s’en dégage.

Pertes et profits” de Léo Lallot nous montre que finalement certaines choses ne changeront jamais : la recherche du profit, la quête de l’info et sa mise en scène. Un expert en climatologie doit donner sa caution pour un projet immobilier foireux. Un reporter cherche justement le scoop en observant sa rencontre avec les promoteurs du projet. Pas mal sur le coup, mais s’oublie vite.

À l’image de Julie Conseil, Jonathan Paglialunga ne se contente pas de nous présenter un tableau peu engageant de notre avenir, juste tiré de notre quotidien, de dire avec fatalité que nous allons droit dans le mur et qu’il n’y a rien à faire, il évoque la possibilité de contrebalancer les rayons nocifs du soleil. Deux scientifiques offrent une solution, un effort mondial est demandé, l’espoir peut renaître. Les dernières lignes d’“Éclipse” remettent ce vaste projet en perspective, nous balançant une grande gifle au passage.
Peut-être la nouvelle la plus marquante de la revue. Celle dont on se souviendra le plus longtemps et à qui je décerne le premier prix.

L’attaque du convoi” de Laurent Salipante est le dernier texte des finalistes du concours. L’eau est une denrée rare excitant toutes les convoitises. Des camions géants à l’équipage fortement armé la convoient. La comparaison avec « Mad Max » tombe sous le sens et enlève au récit de son punch. Toutefois, sans être novateur, ce convoi se suit avec plaisir.

Lu voilà plus d’un mois, ce « Galaxies » spécial concours m’a laissé une très belle impression. 150 pages de nouvelles, voilà déjà une bonne surprise ! Certains textes me sont d’emblée revenus en mémoire, ce qui démontre leur impact ; pour d’autres, il m’a fallu les feuilleter à nouveau. Mais dans l’ensemble, la majorité des auteurs a amplement rempli sa part du contrat. On peut juste regretter que certains ont manqué d’ambition, se contentant de trop peu et ne réussissant pas à nous projeter quarante années dans le futur.

Le dernier quart de la revue est consacré aux rubriques habituelles : “lettre de l’Inde” pour la quatrième fois, “le coin du bouquineur”, “notes de lecture” et “Strips”.
Mais cette partie reste dans l’ombre des nouvelles.
Un numéro à ne pas louper et à rapprocher du « Hors Série Mundanes ».


Titre : Galaxies Nouvelle Série
Numéro : 18 (60 dans l’ancienne numérotation)
Rédacteur en chef : Pierre Gévart
Couverture : Mandy
Type : revue
Genres : SF, articles, critiques, entretiens, etc.
Site Internet : Galaxies
Dépôt légal : juillet 2012
ISSN : 1270-2382
Dimensions (en cm) : 13,8 x 20,9
Pages : 192
Prix : 11€



François Schnebelen
3 octobre 2012


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