Né en 1971, Thomas Day est l’auteur d’une cinquantaine de nouvelles et d’une douzaine de romans, dont deux écrits en collaboration. Plus de la moitié des titres sont disponibles dans le catalogue de Folio SF qui nous offre avec « Du Sel sous les Paupières » un inédit en poche, ce qui est assez rare pour être signalé et encouragé.
La Grande Guerre n’est pas celle que nous avons connue, elle a duré plus longtemps, a été encore plus meurtrière, plus sale. Le continent respire encore ses remugles. À peine achevée, les deux camps cherchent déjà l’arme secrète capable d’anéantir l’ennemi.
L’Apache découvrira jusqu’où l’État est prêt à aller pour parvenir à ses fins. Finalement, son pays vaut-il mieux que l’Allemagne ?
En prolongeant l’horreur du conflit, Thomas Day plonge le lecteur dans une situation où tout a évolué plus rapidement, où les scientifiques ont été mis sous pression pour accoucher au plus vite d’une solution ultime.
Après l’uchronie, nous ne pouvons même plus parler de steampunk, mais plutôt de radiumpunk. Et l’auteur ne s’arrête pas là, le récit se concluant par de la fantasy.
Bizarrement, la partie finale s’avère la moins intéressante. Il faut dire que le début est d’une telle richesse, si prenant que cette conclusion ancrée dans la fantasy mythologique déroute un tant soit peu. Non que l’auteur ne fasse pas montre du même talent, mais pour ma part, j’aurais aimé qu’il poursuive dans la même veine.
Thomas Day a imaginé de superbes personnages, de ceux à qui l’on s’attache, avec qui on vit le récit. La vie n’a pas épargné l’Apache qui franchit allègrement les limites fixées par la loi ; pourtant il fait preuve d’honneur, de cœur, et il trouve de la compagnie parmi des êtres qui ont également souffert.
Thomas Day joue d’ailleurs des références avec le Rémouleur, dont je n’en dévoilerai pas plus, car il participe pleinement à l’intérêt de ce livre et ce serait en déflorer le mystère. C’est d’ailleurs lui qui donne le titre à ce livre, un titre qui évoque indéniablement une scène d’une grande émotion.
« Du Sel sous les Paupières » affiche une belle inventivité, l’auteur nous régale par une imagination fertile au service de l’histoire, même si on peut se montrer tatillon sur le passage en féérie et se demander pourquoi ce prénom simpliste de Mädchen : fille en allemand. Des broutilles en regard du niveau de l’ensemble.
De plus, il ne fait pas dans la surenchère dans l’épaisseur du livre, il préfère l’efficacité et les presque 300 pages sont avalées en un rien de temps. Sur fond d’après-guerre et d’un avenir peu radieux, « Du Sel sous les Paupières » narre une histoire d’amour emportant tout sur son passage. Le lecteur en sort des images plein la tête et avec le sentiment que Thomas Day est décidément un auteur à suivre, car il sait se renouveler au fil de ses écrits.
Un inédit directement en poche, surtout de cette qualité, cela ne se refuse pas, alors foncez !
Il est à noter que la première partie est déjà parue en 1999 sous forme de nouvelle dans l’anthologie « Futurs Antérieurs » de Daniel Riche. Avec le rajout de deux autres parties, d’un prologue et d’un épilogue, la nouvelle “Du Sel sous les Paupières” est devenue un roman dérivant vers la fantasy.
Et contrairement à d’autres de ses productions, accessible à un plus jeune public.
Titre : Du Sel sous les Paupières
Auteur : Thomas Day
Couverture : Aurélien Police
Éditeur : Gallimard
Collection : Folio SF
Directeur de collection : Pascal Godbillon
Site Internet : Roman ; la page consacrée à Thomas Day (site éditeur)
Pages : 292
Format (en cm) : 10,8 x 17,9
Dépôt légal : avril 2012
ISBN : 978-2-07-044309-3
Prix : 7,50 €
Autres ouvrages de Thomas Day chroniqués sur la Yozone :
« La Cité des Crânes » (Le Bélial’)
« Le Trône d’Ébène : Naissance, Vie et Mort de Chaka, roi des Zoulous » (Le Bélial’)
« L’Automate de Nuremberg » (Gallimard, Folio 2€)
« La Maison aux Fenêtres de Papier » (Folio SF)
