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Faune de l’Espace (La)
A. E. Van Vogt
J’ai Lu, Science-fiction, roman (Canada), space opera, 319 pages, août 2011, 7,10€

L’équipage du Space Beagle entreprend un grand voyage d’exploration de l’univers, loin, très loin du système solaire et même dans d’autres galaxies !
Ils croiseront des extraterrestres étonnants et dangereux, mais grâce au personnage d’Elliott Grosvenor, ils vont aussi se convaincre qu’une nouvelle science, le Nexialisme, est seule capable de les aider à se tirer des situations les plus complexes.

Un grand classique de la SF et de son Âge d’Or, régulièrement réédité par J’ai Lu pour notre plus grand bonheur.



Présenté comme un roman narrant les pérégrinations spatiales du vaisseau Space Beagle (ou Fureteur) et d’un équipage aux prises avec de dangereux extraterrestres, « La Faune de l’Espace » est en fait composé de quatre nouvelles distinctes (par ordre d’apparition dans le roman : Black Destroyer de 1939, War of Nerves de 1950, Discord in Scarlet de 1939 et M33 in Andromeda de 1943).

Cependant, dès leur publication en un seul volume, Van Vogt a pris le soin d’intégrer aux histoires originelles publiées dans le pulp américain Astounding Stories de brefs passages permettant de les lier entre elles sans jamais dérouter le lecteur qui les découvrirait pour la première fois assemblées.

On l’aura compris, Van Vogt (1912-2000) a aussi conçu son roman comme un hommage indirect à Charles Darwin, à sa théorie de l’évolution et à son voyage scientifique sur le navire HMS Beagle -d’où le nom, en forme de clin d’œil appuyé de son vaisseau spatial.

Surtout connu en France pour son « Cycle du Ā » (ou « Cycle du non A ») dont les deux premiers volumes furent traduits par un Boris Vian enthousiaste, Van Vogt est aussi l’auteur d’une palanquée de romans déroutants, aux multiples personnages et aux enchaînements quasi surréalistes qui rendent ses intrigues... euh, surprenantes et surtout à nulle autre pareilles (« Le Livre de Ptath », « Créateur d’Univers », etc) !
Il est aussi celui qui écrivit deux sympathiques classiques de la SF que tout amateur se doit de lire avec « À la poursuite des Slans » et le présent « La Faune de l’Espace » (qui mériteraient tous les deux des traductions révisées vu qu’elles ne sont pas loin de fêter leur soixante ans).

Le premier niveau de lecture (et chez Van Vogt les niveaux de lecture sont souvent nombreux !) raconte très simplement quatre rencontres avec des individus ou des races aliens.
Suivant le même schéma narratif, par quatre fois, le vaisseau et son équipage seront en grand danger.
Dans ces nouvelles originelles, Van Vogt s’interroge à chaque fois sur l’histoire des civilisations rencontrées, leur ascension ou leur déclin, sur les motivations réelles qui rendent certains de ses individus particulièrement agressifs, mais jamais il ne s’érige en juge moral de l’autre.
Si l’équipage tue ou se débarrasse de certains extraterrestres, il s’agit avant tout d’un processus de survie et non d’une volonté d’extermination prévue à l’avance.

Un second niveau de lecture fait la part belle à la science inventée par Van Vogt à cette occasion : le Nexialisme. Une science qui va irriguer tout le roman et dont chaque intrigue permettra de vérifier la puissance.
Une création intellectuelle étrange et pratique qui agrège toutes les autres sciences et permet d’étudier statistiquement toutes les variantes possibles permettant la résolution de n’importe quel problème.
Le personnage d’Elliott Grosvenor en est le prosélyte le plus efficace. Si le Nexialisme laisse le reste de l’équipage dubitatif, il va peu à peu convaincre ses compagnons de son utilité.

Cependant, rien n’est jamais simple chez Van Vogt et si le Nexialisme est le Deux ex Machina du roman, ces quatre aventures vont surtout lui permettre d’affirmer une morale bien précise : un être supérieur, mais solitaire, est forcément plus faible qu’un groupe d’individus socialement organisés.

Ainsi en est-il de la confrontation avec le IXTL (Discord in Scarlet), un être particulièrement agressif qui a la faculté de pondre ses œufs dans le corps de ses victimes encore vivantes (vous qui cherchiez l’origine de l’Alien de Ridley Scott, ne cherchez pas plus loin, vous l’avez trouvée). Même logique avec le ZORL (Black Destroyer), un animal capable d’interférer avec toutes les ondes magnétiques, qui peut traverser un mur comme qui rigole et vient boulotter les membres de l’équipage avant de regagner sa cage !
Problème de plus grande ampleur avec l’ANABIS (M33 in Andromeda), une entité spatiale absorbant l’énergie des être vivants qui vit dans la peur perpétuelle de mourir de faim... mais même conclusion. Le Nexialisme en viendra à bout.
Une intrigue et une entité extraterrestre qui ne sont pas sans rappeler celles d’un écrivain français de SF aujourd’hui trop méconnu, le Lot-et-Garonnais Yves Dermèze et son « Titan de l’Espace » (1954). La première parution de « La Faune de l’Espace » étant de 1952 (Le Rayon Fantastique) et le roman de Dermèze ayant une origine bien antérieure, tout semble confirmer qu’il s’agit d’un hasard créatif et en aucun cas d’une influence réciproque -même inconsciente. Ces deux textes n’étant tout simplement pas traduits dans la langue de l’autre au moment de leurs écritures respectives.
Récit sans aucun doute plus original et ambitieux, la rencontre avec le peuple des RIIM (War of Nerves) est finalement tout aussi dangereuse. Ces extraterrestres tentent de communiquer par voie télépathique avec les hommes et sans le savoir sèment le chaos dans les esprits de l’équipage du Space Beagle.
Cependant, là aussi, grâce au Nexialisme Elliott Grosvenor prendra directement contact avec les RIIM, sauvera le vaisseau et empêchera accessoirement les humains d’aller anéantir cette race à l’esprit collectif surpuissant.

Témoignage littéraire d’une époque où la science fiction explorait de nouveaux territoires, « La Faune de l’Espace » regorge d’inventions, de trouvailles, de sujets de réflexion et fait la part belle au suspense.
L’écriture utilisée est limpide (utilisation majoritaire des temps simples -présent, passé simple, futur), directe (phrases courtes), linéaire, sans circonvolution inutile, équilibrant séquences de dialogues et belles descriptions, d’une lecture très facilement accessible.
Et même si l’on sourit parfois aux grosses ficelles de Van Vogt (de nombreux chapitres se terminent par une phrase courte et choc, le même canevas anime la logique et la construction de chaque intrigue), on relit avec grand plaisir « La Faune de l’Espace ».

Ce roman qui aura influencé tout autant la création de la série « Star Trek », que l’univers des mangas ou Ridley Scott est toujours un classique à découvrir en 2011.


Titre : La Faune de l’Espace (The Voyage Of The Space Beagle, 1939, 43 et 50)
Auteur : Alfred Elton Van Vogt
Roman composée de : Black Destroyer (1939), War of Nerves (1950), Discord in Scarlet (1939) et M33 in Andromeda (1943)
Précédentes éditions (France) : Le Rayon Fantastique (n°15, 1952), J’ai Lu, 1971, 1972, 1973, 1977, 1979, 1981, 1984, 1987, 2003, 2011, Volume commun avec « À la poursuite des Slans-La Faune de l’espace », Opta (CLA, 1968)
Traduction de l’anglais (Canada) : Jean Rosenthal (Le Rayon Fantastique, n°15, 1952)
Couverture (illustration) : Grégore Hénon
Éditeur : J’ai Lu
Collection : Science-fiction (Imaginaire)
Site Internet : une très intéressante page Wikipédia sur le sujet, fiche roman (site éditeur)
Parution : 31 août 2011
Pages : 319
Format (en cm) : 11,1 x 1,7 x 17,8 (poche)
EAN : 9782290036778
ISBN : 978-2-290-03677-8
Prix : 7,10€



Stéphane Pons
4 octobre 2011


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Nouvelle édition d’un classique de la SF (J’ai Lu, n°392, 2011).



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