Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Éternelle Jeunesse
Anthologie dirigée par Thomas Riquet
Asgard, Reflets d’Ailleurs, anthologie, 206 pages, mars 2011, 11,50 €

La bonne idée de cette anthologie est d’avoir mêlé de jeunes auteurs issus du fanzinat ou des micro-publications à quelques auteurs confirmés.
Mais elle ne parvient à trouver son unité ni autour du thème (certaines nouvelles ne semblent que très très peu avoir à faire avec la jeunesse éternelle...), ni dans la qualité minimum qu’un lecteur peut attendre (certaines nouvelles sont un peu en deçà du seuil acceptable selon moi...)



Cette anthologie est très inégale et un peu bancale.

Derrière une couverture, dont on ne peut pas dire qu’elle soit jolie (non, on ne peut pas), on trouve une mise en forme étrange et déroutante : qu’est-ce que c’est que ces pages blanches à la toute fin du volume, ce choix pour le moins maladroit de police pour les alternances dans certaines nouvelles, cette forme pour la table des matières ???...

Sans être un psychorigide de la forme, je trouve dommage que quelques jeunes (ou moins jeunes, hélas !) maisons d’édition (et je ne parle pas ici que de Asgard) ne se penchent pas plus que ça sur ce que c’est qu’un livre. Comme objet, je veux dire : comment c’est fait, quelles règles typographiques et de mise en page doivent être respectées... Et ceci, pas simplement parce que les typographes ont décidé que ça devait être comme ça, mais pour une chose toute simple, en fait : le plaisir du lecteur. Que la forme ne fasse pas obstacle au fond...

Après ce début de chronique un peu en mode gronchon, entrons dans le vif du sujet. Je passe sur l’introduction, descriptive des différents plats à venir (et donc parfaitement inutile). Arrive la nouvelle qui, selon les dires de l’anthologiste, lui a donné l’idée du thème dont il sera question ici. “L’illusion noire”, de Julie Blanc (sic). Jeune lycéenne, cette auteure nous propose un texte de SF gentil, bien foutu, mais très dispensable, dans le thème comme dans le traitement.

Le deuxième texte, de Peggy Van Peteghem, “Strip-Poker”, manque d’ambition. Je veux dire, d’ambition littéraire, textuelle. L’idée est très bonne, et tout le début monte en crescendo pour... arriver sur une ellipse placée bien trop tôt, et qui vient gâcher ce qui avait été réussi jusque là : faire monter l’ambiance !... Dommage, car la prose, l’idée et l’auteure auraient mérité mieux que ça.

Viennent ensuite “Le Privilège des Dieux”, d’Élisabeth Ebory, une fable un peu rigolote, relativement sympathique, mais hélas oubliée à peine lue, et “Sue3”, d’Élodie Meste, sur un thème lu, relu et vu à la télé. Pas mauvais en soi, mais (et c’est un avis qui n’engage que moi) qu’on ne s’attend pas à trouver dans une anthologie éditée.
Dans un fanzine, nous serions ici sur du relativement bon.
Mais nous ne sommes pas dans un fanzine.

Le Livre du Musicien”, de Julien d’Hem, relève un peu ce début d’anthologie poussif : un récit de grosse fantasy qui tache, avec de la magie et tout et tout, mais aussi avec une ambiance. Une vraie ambiance, la première dans une nouvelle de cette anthologie.
Dieu que ça fait du bien !

Puis viennent les trois des quatre bons textes du volume...

Le premier des quatre, c’est “Issu de la glaise”, de Jean Milleman. Un golem, une histoire d’amour, un message écologiste simple. Bien sûr, il va sans dire qu’il serait bien d’arrêter de dézinguer la planète. Mais ça va toujours mieux en le disant, surtout sous la plume poétique de Jean Milleman ! Premier coup de cœur.

Le deuxième, c’est “Nouvelle science”, du duo Patrick Eris et Nemo Sandman. Un texte ramassé, percutant, sur l’illusion de la quête d’éternité et ses risques logiciels (lisez le texte, vous comprendrez...)

Et le troisième, c’est la très belle nouvelle de Jean-Michel Calvez, “Génération spontanée” : courte et percutante, avec une ambiance menée de main de maître.

Quand tu seras bien vieille...” de David Bry, propose ensuite une pochade sympathique, mais sans réel intérêt, d’autant plus difficilement appréciable qu’au beau milieu des bon textes de l’anthologie.

Car le suivant est “My Generation”, de Lucie Chenu.
Non qu’il soit absolument excellent (j’ai déjà lu, sous la plume de l’auteure, des textes plus aboutis et passionnants), mais on sent tout le poids de l’histoire qui passe dans ces pages. Personnelle comme générationnelle. Une bien belle réussite.

L’anthologie se referme sur une histoire de Vincent Mondiot, “Y a-t-il une vie après le lycée ?”. Texte ma foi fort intéressant, mais qui aurait mérité mieux (le rôle de l’anthologiste !). Pas de réelle déception, mais un sentiment que l’auteur en avait encore sous le pied...

Ce livre, qui est l’anthologie officielle du festival Zone Franche, laisse un sentiment d’inachevé. Comme s’il y avait eu un réel manque dans la direction littéraire. Les petits défauts lus dans les textes auraient pu être gommés, corrigés, l’ambiance générale (et l’organisation) de l’anthologie, un peu peaufinée.

Message personnel à l’anthologiste et aux auteurs : en rédigeant cette chronique, je ne cherche en aucun cas à être méchant gratuitement, mais à rappeler une réalité de base : ce qui compte, toujours, c’est le plaisir du lecteur.
Et s’il n’y avait eu les deux très bons textes de Jean Milleman et de Jean-Michel Calvez, s’il n’y avait pas eu les deux bons textes de Eris-Sandman et Lucie Chenu, je pense que mon plaisir de lecteur aurait été quasi absent...


Titre : Éternelle Jeunesse (nouvelles)
Auteur : Collectif (anthologie dirigée par Thomas Riquet)
Couverture : Alödâh
Éditeur : Asgard
Collection : Reflets d’ailleurs
Site Internet : page anthologie (site éditeur)
Pages : 206 pages
Format (en cm) : 15,5 x 23,5 x 2 cm
Dépôt légal : mars 2011
ISBN : 2919140019
Prix : 11,50 €



Jérôme Charlet
24 juin 2011


JPEG - 27.2 ko



Chargement...
WebAnalytics