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Claire Gratias : les rêves et la crise
mai 2011
Une interview YOZONE

Le nom de Claire Gratias a commencé à nous siffler aux oreilles lors de la sortie de « Une sonate pour Rudy », un polar noir pas piqué des hannetons.
C’est évidemment avec sa venue dans le cercle de la SF, et particulièrement dans la collection SOON de chez Syros, que nos yeux se sont écarquillés.
Mais Claire Gratias est avant tout une écrivain et une raconteuse d’histoires, dans les genres qu’elle apprécie, et puis c’est tout, voilà !
Parole à l’intéressée…




Claire Gratias sur LA YOZONE :
- Breaking The Wall
- Operation Maurice
- Le protocole de Nod : Le signe de K1 – T1
- Le temps des Tsahdiks : Le signe de K1 – T2


Bonjour Claire Gratias. Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Enthousiaste, impatiente, toujours en quête de bonnes histoires à lire ou à écrire, et surtout, passionnée par l’humain, dans toutes ses dimensions.

On vous connaît surtout dans le policier avec « Sonate pour Rudy » ou le polar sur fond historique avec « Breaking The Wall ». Qu’aimez-vous dans ces genres ?

Le polar, plus spécifiquement le roman noir, m’intéresse depuis toujours parce que c’est ce que Manchette appelle « le roman de la crise ». J’aime montrer un personnage à l’orée d’une situation de crise, le suivre pendant qu’il la traverse et regarder comment il s’en sort, ce qui a changé en lui, en quoi cela l’a fait avancer. Mes romans ont toujours un aspect initiatique, même s’il est dissimulé derrière une intrigue policière ou autre.

Pourquoi avoir écrit un livre de SF comme « Le Signe de K1 » (ou des livres de SF avec les Mini-Soon) ?

Le polar et la SF attirent souvent les mêmes lecteurs… et les mêmes auteurs ! Parce que leurs enjeux sont similaires et qu’ils permettent, par le biais d’une bonne fiction, d’aller explorer ce qu’il peut y avoir de problématique dans l’homme ou dans la société. Ils nous font également du bien par leur aspect cathartique, un peu à la manière des contes, car ce sont des genres qui permettent de repousser les limites. Mais je choisis toujours de donner à mes romans une fin positive, car ça ne m’intéresse pas du tout de plomber le moral des lecteurs.

Est-ce l’aspect écolo qui vous a le plus intéressé au départ ou alors cette folie humaine de vouloir absolument contrôler son futur en modifiant son passé ?

Il me semble difficile à l’heure actuelle, ou totalement inconscient de refuser de prendre en compte ce que l’homme est en train de faire subir à sa planète (et à lui-même !) ou de refuser de réfléchir aux conséquences des choix technologiques et industriels qui ont été faits depuis un siècle et plus. Déforestation, O.G.M, nanotechnologies, industrie agro-alimentaire… quelques exemples parmi les mots qui me font frémir ! Ajoutez à cela l’individualisme à tout crin et le culte voué à la performance et à l’esprit de compétition, il n’y a rien là-dedans qui vous inquiète ?

L’homme vous paraît-il pouvoir faire preuve de suffisamment de sagesse pour sauver sa propre planète, voire sa propre espèce ?

Tout dépendra du degré d’évolution de conscience auquel il parviendra dans les décennies qui viennent.

Nous faudra-t-il penser à une possibilité de retour dans le temps pour modifier les bêtises humaines ?

J’aime beaucoup la phrase de Gide qui dit « Ce qu’il y a de beau dans la vie, c’est qu’il faut y peindre dans le frais : la rature y est défendue »…
Alors pour moi, il n’y aura pas de seconde chance, pas de possibilité de raturer pour recommencer. Comme dit Souchon « On avance, on avance /C’est une évidence / On n’a pas assez d’essence / Pour faire la route dans l’autre sens / Alors on avance…  »

Pourquoi votre ABEL est-il un tueur et K-1 une sorte de protecteur ?

Dans la Bible, Abel est innocent, c’est Caïn qui tue. Mais Dieu appose sur lui le fameux « signe de Caïn » qui le protège de toute violence et empêche que quiconque lève la main sur lui, avant de l’obliger à s’exiler en terre de Nod. Caïn et ses descendants seront donc à la fois protégés et marqués à vie, signalés au regard des autres comme appartenant à une génération de meurtriers… J’aime bien partir des mythes anciens, me plonger au cœur de leur symbolique et la retravailler pour donner une base « universelle » à mes fictions.

Et ce mot Tsahdik, d’où vient-il ?
J’ai juste modifié l’orthographe du mot hébreu « tsadiq », qui désigne le Juste.

La seconde partie du tome 2, « Le Temps des Tsahdiks », ressemble à un thriller d’action. Cette histoire en deux tomes vous a-t-elle permis de toucher à un peu tous les genres que vous vouliez aborder ?

C’était la première fois que je concevais une histoire qui allait se dérouler sur plus de six cents pages. Je voulais donc qu’elle se déploie de façon progressive, avec une assez longue exposition, puis une succession d’événements et d’actions dont l’intensité irait crescendo jusqu’au dénouement qui constituerait une sorte de point d’orgue. Je ne voulais pas d’un roman « plan-plan » dont le lecteur aurait du mal à tourner les pages. Pour cela, il est indéniable que le fait de m’être déjà frottée au polar m’a beaucoup aidée.

La SF, ou anticipation ici, vous a-t-elle suffisamment séduite pour que vous vous lanciez dans un nouveau roman de ce genre ?

Moi qui n’avais encore jamais abordé ce genre, j’en ai fait quatre coup sur coup, et j’avoue que je me suis prise au jeu ! Actuellement je m’accorde un temps de pause avant de me lancer dans un nouveau projet, mais il est vrai que j’aurai désormais du mal à ne pas introduire d’éléments « surnaturels » dans mes romans…

Dans les Mini-Soon que vous avez écrits, vous utilisez plus l’humour. Est-ce parce qu’ils sont adressés à des enfants plus jeunes ?

L’esprit de la collection est d’initier les plus jeunes à la science-fiction à travers ses grands thèmes principaux, de manière à leur donner envie, un peu plus tard, de se plonger dans des romans de SF, que ce soit des « Soon » ou d’autres collections. Il est vrai que l’humour donne souvent une dimension attractive… à condition que cela soit réussi ! Je ne perds pas de vue le fait que les enfants ont souvent un sens de l’humour très différent de celui des adultes, c’est donc un ingrédient à manipuler avec précaution, sinon on risque le four (= bide total en langage d’jeuns).

Où aimez-vous travailler ?

L’hiver, dans mon bureau, entourée de tonnes de bouquins, face à la fenêtre (j’aime voir le ciel), et l’été, dans un jardin ou sur une terrasse, pendant que le soleil me chauffe le dos, ça stimule mes neurones. Dans un cas comme dans l’autre : au calme !

Avez-vous une méthode de travail particulière ?

Je serai bien incapable de définir ma « méthode » de travail, si tant est que j’en ai une ! Il y a des moments où des choses commencent à se raconter dans ma tête et cognent à la porte. Alors je m’assois… et j’écris !

Avez-vous un objet fétiche pour écrire ?

Non, plutôt des livres et des auteurs fétiches : un portrait de Giono à sa table de travail à Manosque, et dans ma bibliothèque, « Moby Dick », « Martin Eden », « Des Fleurs pour Algernon », « Le Jeune homme, la mort et le temps », « Le Voyageur imprudent », l’intégrale des Rougon-Macquart, tout le théâtre de Musset, mais aussi Gaboriau, Fred Vargas, William Irish, Stephen King

Avez-vous un rituel avant de commencer un livre ? Pendant l’écriture ? Après l’avoir terminé ?

J’ouvre un carnet qui, au fil des semaines, devient une sorte de journal de bord, carnet de voyage, journal intime du livre en train de s’écrire, un peu comme le fameux « Journal des Faux-Monnayeurs » d’André Gide. J’y note au fur et à mesure les idées, les projets pour l’intrigue ou la construction, les questions d’écriture qui se posent à moi, mes doutes, mes hésitations, etc. J’y colle des images, des photos, des illustrations glanées ici ou là en lien avec ma thématique. À la fin, j’ai du mal à le fermer ! Je possède maintenant un à deux de ces « carnets » pour chacun de ces romans. Un jour, ça vaudra cher, les collectionneurs se les arracheront, j’en suis sûre !

Auriez-vous quelques conseils à donner à un aspirant-écrivain ?

Plutôt aux « transpirants-écrivains » : comme disait Jacques Brel, le talent, je ne sais pas ce que c’est. Les artistes ? Connais pas. Le talent, c’est avant tout AVOIR ENVIE de faire quelque chose. C’est de la sueur, du travail. Alors… « pas un jour sans une ligne », mais bon, même moi, j’ai du mal !

Quel est votre futur éditorial ?

Un album avec l’illustratrice Sylvie Serprix, et un texte pour le magazine Je Bouquine à l’automne. Pour le reste, c’est encore top secret, mais une chose est sûre, au programme : des romans, du suspense, et de l’action !

Merci beaucoup Claire.


Michael Espinosa
17 mai 2011


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