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6ème Sens
Film américain de M. Night Shyamalan (1999)
5 janvier 2000


Genre : film de fantômes
Durée : 1h42

Avec Bruce Willis (Dr. Malcolm Crowe), Haley Joel Osment (Cole Sear), Toni Collette (Lynn Sear), Olivia Williams (Anna Crowe), Mischa Barton (Kyra Collins), Trevor Morgan (Tommy Tammisimo), Donnie Wahlberg (Vincent Grey), Peter Anthony Tambakis (Darren)

Si au commencement était l’histoire, cela n’évince en rien l’importance de son traitement. Personnellement, j’avoue avoir toujours eu un faible pour les scénarios surprenants, entêtants, voir déconcertants, à l’image de « Beyond a reasonable doubt » de Fritz Lang, « Usual suspect » de Bryan Singer ou encore plus récemment « Fight Club » de David Fincher. Ces films qui, après l’apparition du mot « fin » (ou « The End »), vous plongent dans l’agréable (ou désagréable) sensation d’avoir été trompé, berné et qui ne vous poussent qu’à une chose, revoir le film afin de contrôler que rien ne cloche.
Le « sixième sens » fait partie de ce genre de récit, ce qui explique, peut-être, son succès au Box-Office américain (second pour l’année 1999 après la « Menace Fantôme »). D’ailleurs, je reste persuadé que nombre de personnes sont retournées à une seconde séance pour juger de la qualité de cette « supercherie », bien que supercherie ne soit pas vraiment le terme approprié, car la qualité est vraiment au rendez-vous.

Nageant dans les eaux troubles et fréquentées mêlant thriller psychologique, cinéma d’horreur et au-delà, cette nouvelle contribution cinématographique de Bruce Willis le sort des sentiers battus (et rebattus) par l’acteur de « Piège de Cristal » et des stéréotypes de ses rôles de gros durs au cœur tendre.
Non, ici, - n’en déplaise à certains fans - le copropriétaire du « Planet Hollywood » ne sauve pas le monde (Will Smith ou Arnold Schwarzegger devaient être certainement sur l’affaire), il ne joue pas non plus des flingues, ni des poings et ne massacre ni navette spatiale, ni t-shirt. Au contraire, le rôle qu’il interprète est plus proche de celui d’une victime que du redresseur de torts.

Psychiatre spécialisé dans les enfants à problèmes, il fête, avec sa femme, la récompense que la ville de Philadelphie vient de lui attribuer pour son travail, lorsque l’un des ses anciens patients pénètre chez lui et lui tire dessus ! Sale coup et énorme désillusion !!
On le retrouve l’automne suivant, en train d’attendre un garçon âgé de huit ans, du nom de Cole Sear, victime des mêmes symptômes que son ex-patient et agresseur, une peur viscérale et maladive.
A la recherche d’une « rédemption » professionnelle, depuis son échec troublant, il désire, à tout prix, s’occuper de ce cas.

C’est un rôle tout en nuance et très intériorisé qui a été offert à Bruce Willis avec ce personnage du Docteur Malcom Crowe, coincé entre ses remords professionnels et l’échec de sa vie de couple, qui en est arrivée au stade d’une mutuelle indifférence.
Après des premiers contacts difficiles, une amitié va se nouer entre l’homme et l’enfant qui finira par lui avouer son secret : son « sixième sens » lui permet de voir, parler, toucher les fantômes d’individus qui ignorent ... qu’ils sont morts.
Ce gamin est-il « normal » ou juste un « Freak » ? Est-il vraiment connecté avec l’au-delà ou ses visions sont-elles le fruit d’une imagination perturbée ? Quant à ces apparitions, viennent-elles à lui uniquement dans le but de l’effrayer ?

C’est le point de départ de cette enquête psycho-surnaturelle, dans laquelle l’enfant et le thérapeute, à la recherche d’une explication rationnelle, finiront par découvrir une incroyable vérité, au-delà de leur imagination.
Vraiment original, « sixième sens » n’utilise pas les habituels artifices des films dit d’horreur ou d’épouvante, faisant étalage d’effets spéciaux, créatures diaboliques, et autres décors démesurés menant parfois au ridicule, comme ce remake de « The Haunting », ou encore mettant en scène un super héros, qu’une quelconque prophétie a désigné comme sauveur de l’humanité face à une apocalypse annoncée - « La fin des temps ».
Non, ici, c’est un univers à l’échelle humaine qui nous est dépeint et la peur, à l’image des personnages, est ancrée dans la réalité, au cœur de notre quotidien, jouant sur les psychoses communes au genre humain - la peur de l’abandon, de la solitude, du mensonge et de l’inconnu - pour mieux se fondre avec nos propres angoisses.
Si le thème et son style narratif peuvent évoquer « La malédiction » de Richard Donner ou le « Rosemary’s baby » de Polanski, l’absence de connotation religieuse l’évince, tout de même, de ce genre de propos.
Scénariste et réalisateur de 28 ans, Night Shyamalan a choisit sa ville natale, Philadelphie, comme théâtre de son récit. Choix judicieux puisque l’ancienne capitale des Etats-Unis est l’une des rares villes américaines possédant une architecture chargée d’un patrimoine historique (récent, d’accord, mais d’ailleurs, n’y a t-il pas antinomie entre USA et patrimoine historique ?).
Servi par une partition musicale à la présence envoûtante, c’est par de subtiles touches successives que le réalisateur nous entraîne vers les portes de l’angoisse. Tout d’abord en distillant aux spectateurs quelques repères pour nous annoncer avec froid et effroi les éléments surnaturels du récit : en effet, les évènements hors norme, touchant au monde de l’au-delà, sont toujours annoncés par une très nette baisse de température, traduite à l’écran par la respiration embuée des protagonistes, nous transmettant un état propice à la chair de poule.
S’en suivent les visions de l’enfant, dont la brièveté et la simplicité apparentes les rendent, à nos yeux, plus crédibles et réelles, car si proches de nos propres cauchemars.
Quant à l’interprétation, elle est en tout point remarquable. Bien entendu, Bruce Willis est irréprochable et convaincant dans ce rôle de psychiatre et sert à merveille, non seulement le récit, mais également ses partenaires.

Et, au cas de vous surprendre, c’est surtout le jeune Haley Joël Osment, qui crève l’écran, portant littéralement le film sur ces frêles épaules - sa prestation étant à des années-lumière de la récitation de texte d’un autre « Actor Kid » de l’année, Jake Lloyd, apparu dans l’épisode I d’une obscure saga galactique.
Vraiment troublant, l’enfant-acteur du « sixième sens » joue sur tous les registres - intonations, silences, regards et attitudes - pour nous faire partager les terreurs de son personnage.
Mais il ne faudrait pas oublier (et cela sans aucun rapport avec la notion de parité si tendance, actuellement, dans notre pays) les deux personnages féminins de cette histoire, extrêmement bien campés également. A savoir Olivia Williams dans le rôle d’Anna Crowe, la femme délaissée et surtout la maman du petit Cole, Lynn Sear, à qui l’étonnante actrice australienne, Toni Collette, prête ses traits.
Ajoutons à cet excellent constat, les éclairages de Tak Fujimoto, ex-directeur photos attitré de Jonathan Demme, les décors de Larry Fulton, l’excellente partition de James Newton Howard et le très bon niveau de l’équipe de production.
Bien que relativement lent, le climat obsédant de « sixième sens » n’est en rien anesthésiant (pour preuve, malgré une projection matinale, je ne fus aucunement attiré par Morphée me tendant les bras), d’ailleurs, les réponses à nos interrogations, sous la forme des visions de l’enfant, ont tôt fait de nous réveiller et de nous hérisser le poil.
Nous devrions, dans un proche avenir, entendre à nouveau le nom de Night Shyamalan, qui est, depuis, singulièrement dragué par Hollywood, mais également celui du jeune Haley J.Osment. Et d’ailleurs, s’il n’existe pas une catégorie « actor kid » aux oscars, il faudrait penser à la créer rapidement.
Après le surprenant « The Truman Show », le virtuel « eXistenZ », le spectaculaire « Matrix » et le très décapant « Fight Club » de l’année passée, on entame l’an 2000 sous les meilleurs auspices.
Souhaitons que cela continue !

pour Imagivore : Les Imaginautes, (Critique parue dans ASFC 2000)

FICHE TECHNIQUE

Titre original : The Sixth Sense

Réalisation : M. Night Shyamalan
Scénario : M. Night Shyamalan

Producteurs : Kathleen Kennedy, Frank Marshall & Barry Mendel
Producteur exécutif : Sam Mercer

Musique originale : James Newton Howard
Photographie : Tak Fujimoto
Montage : Andrew Mondshein
Casting : Avy Kaufman
Décors : Larry Fulton
Direction artistique : Philip Messina
Costumes : Joanna Johnston
Effets spéciaux : David McCullough

Production : Hollywood Pictures & Spyglass Entertainment
Distribution : Gaumont Buena Vista International (GBVI)


Bruno Paul
5 janvier 2000



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